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était absolument plat. Sur ce glacis, les cultures offraient d’excellents abris aux vues ; elles étaient réparties uniformément sur toute la pente, mais consistaient en deux espèces bien distinctes : les fèves et le sorgho. Les fèves ne dépassaient pas le mollet ; le sorgho, au contraire, atteignait à cette époque de l’année la hauteur d’un premier étage : trois mètres à trois mètres cinquante.

Cette plante, nommée kaoliang par les Chinois et gaolian par les Russes, mérite une mention particulière. Elle sert à presque tous les usages de la vie en Mandchourie ; elle représente pour les Chinois ce que le bambou est à l’Annamite, le cocotier au Canaque, le dattier au Bédouin. La graine sert à faire le pain, et on en tire aussi par la fermentation une horrible eau-de-vie qui fait les délices des indigènes. La partie inférieure de la tige, qui est rigide et dure, remplace le bois comme combustible et le chaume pour couvrir les maisons ; elle sert, de plus, à clôturer les cours et les jardins. Avec le haut de la pousse, on nourrit le bétail. Dans les champs, les épis de gaolian sont serrés les uns contre les autres, de manière à rendre la traversée difficile pour les fantassins et impossible pour les cavaliers ; il existe seulement quelques sentiers où les troupes montées doivent passer en file indienne. Ces champs de gaolian, alternant avec ceux de fèves, offraient donc des couverts aux vues complets pour l’assaillant ; les Russes, cependant, ne les avaient fauchés qu’à cinquante mètres en avant des défenses accessoires, soit à cent cinquante mètres environ en avant de leurs tranchées.

L’artillerie de la défense comptait — comme nous pûmes le constater plus tard, en relevant le nombre des épaulements destinés à la protection des pièces — sept batteries de campagne : la première était placée en arrière de la crête A ; cinq autres réparties en arrière des collines B et C ; la dernière défendait les positions en échelon L–M ; au total, cinquante-six canons. Toutes, sans exception, étaient placées en arrière des crêtes, de manière à ne pouvoir exécuter que du tir indirect.

Telle était la position contre laquelle marchaient les Japonais venant du sud. Dans la matinée du 29 août, cette marche