Page:Revue de Paris - 1905 - tome 1.djvu/701

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
695
les théories tactiques et la guerre actuelle

glacis, utilisant le terrain et marchant comme la première. La troisième ligne suivit la seconde et ainsi de suite. Six vagues successives montèrent la côte semée de cadavres et de blessés et, l’une après l’autre, vinrent se tapir derrière le talus protecteur, à cent mètres de la ligne ennemie. Pendant ce temps, des volontaires avaient coupé les fils de fer sous la bouche même des fusils russes ; en rampant, ils réussirent à ouvrir des passages à travers les défenses accessoires ; mais bien peu de ces héros rejoignirent leurs camarades.

Quand tout le monde fut réuni, on mit baïonnette au canon. De mon observatoire, je vis toute la ligne comme illuminée par l’éclair de l’acier sortant des fourreaux. Une fois de plus, les officiers quittèrent l’abri au cri de banzaï « hourra », répété par tous les assaillants. La masse entière se rua sur les tranchées. Alors, du côté des Russes, la longue ligne grise des fusiliers sibériens se dressa à son tour, envoya une dernière salve sur l’ennemi et descendit en courant le revers de la montagne. Sur d’autres points du front, les Russes attendirent l’ennemi ; le combat s’engagea à la baïonnette et les Japonais furent rejetés. Plusieurs tranchées en B et C, ne purent être enlevées de vive force, mais les derniers défenseurs, menacés d’être coupés, se replièrent pendant la nuit. Le lendemain matin, toutes les lignes de Chiouchanpou, ainsi que la position flanquante de Fantziatoun (L–M), avaient été évacuées.


III


Le rôle de l’artillerie japonaise m’a beaucoup surpris ; je m’attendais à la voir soutenir jusqu’au bout l’attaque de son infanterie. Mais, à peine la première ligne avait-elle fait la moitié du chemin que les batteries japonaises cessèrent le feu, précisément à l’instant où elles auraient rendu les plus grands services.

On ne peut attribuer cette abstention qu’à la crainte de tirer sur ses propres fantassins ; il faut avouer que la mauvaise qualité des munitions japonaises permet d’adopter cette