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LETTRES DE SAINTE-BEUVE

j’ai suivi les cours dans ma jeunesse : je le sais aussi habile que plein de ménagements. Mais je me suis trouvé amené à me mettre entre les mains d’un autre spécialiste des plus distingués, aussi adroit que prudent, le docteur Philips. Il m’observe et se rend compte de ce que je puis avoir : car ce n’est pas encore très clair.

Madame Victor Hugo copie et envoie dans une « lettre à tous », adressée à son mari et à ses enfants, à Hauteville-House, le passage de la lettre de Sainte-Beuve concernant Victor Hugo : bonne et loyale jusqu’à la fin, elle aura gardé toujours, elle aura sans doute emporté en mourant[1] l’espoir d’une réconciliation possible.


IX

le « livre d’amour »


Nous voici arrivés à la partie pénible de la tâche que nous avons entreprise, à la conclusion nécessaire il nous faut parler du Livre d’amour.

Rien n’est plus douloureux que de rompre cette chose sacrée, le silence autour des tombes. Mais le Livre d’amour a été publié, discuté, commenté ; tous l’ont qualifié sévèrement, mais beaucoup ont pu ou voulu y croire : on ne peut le laisser sans réponse. Les lettres de Sainte-Beuve à Victor Hugo, par nous retrouvées, ont été la première justification de madame Victor Hugo ; où irons-nous chercher de quoi achever la réfutation du Livre d’amour ? dans le Livre d’amour même. Il suffira d’en relever les exagérations et les impossibilités.

Le plus abominable des mensonges que renferme ce livre menteur est celui de la pièce intitulée À la petite Ad… « La petite Ad… », c’est la petite Adèle, la filleule de Sainte-Beuve. Dans des termes alambiqués et volontairement obscurs, il n’affirme pas précisément, mais il laisse entendre que sa filleule pourrait bien être sa fille. Il dit à la petite, dans un vers assez singulier :

…Enfant, toi, — je te voi
Pure et tenant pourtant quelque chose de moi…

Or, pour que la petite Adèle, née le 25 juillet 1830, fût réelle-

  1. Elle mourut à Bruxelles, le 27 août 1868.