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REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

Est-il même bien correct de dire que la ligne droite est une relation entre deux points ? Non, c’est une relation entre trois points étant donnés trois points de l’espace, il peut y avoir entre eux une relation, celle d’être en ligne droite, ou la relation inverse, celle de n’être pas en ligne droite.

On pourrait soutenir plus facilement que la distance est bien une relation entre deux points. Quand je dis que la distance des points et est d’un mètre, il semble d’abord que dans cette proposition n’interviennent que deux points et , et cependant, pour qu’elle ait un sens, il faut que je sache ce que c’est qu’un mètre, et je ne puis définir le mètre que comme la distance de deux autres points et .

Il vaut mieux dire que la distance est une relation entre deux couples de points et  ; entre ces deux couples il peut y avoir trois relations ou bien la distance est égale à la distance , ou bien elle est plus grande, ou bien elle est plus petite.

Il importe de bien préciser ce point, parce que cela éclaircira beaucoup la suite de cette discussion.

§ 9.

Cela posé, « l’axiome de la distance » s’impose-t-il à nous ?

Est-il nécessaire que deux points déterminent toujours une quantité, c’est-à-dire que deux couples de points puissent ne pas être congruents ? Est-il absurde, en d’autres termes, de supposer que, dans le groupe de transformations qui servent à définir l’égalité des figures, on ne puisse pas toujours en trouver une qui transforme un couple de points quelconque en un autre couple de points également quelconque ?

C’est ce que M. Russell cherche à démontrer aux §§ 163 et 164 ; j’avoue que je ne comprends pas du tout son raisonnement, où je ne vois qu’une pétition de principe à peine déguisée.

Si je laisse ce raisonnement de côté, et que j’examine la question en elle-même, je vois bien que sans « l’axiome de la distance » la mesure des longueurs deviendrait impossible, mais il n’en est pas de même de la mesure des volumes. A-t-on alors le droit de dire que « la grandeur spatiale ne serait pas mesurable » sans préciser davantage le mot grandeur spatiale ?

A-t-on par contre le droit de dire que cette relation doit être unique ? Pas davantage ; M. Russell cherche à le démontrer (p. 166, § 165) en disant que s’il y avait plusieurs relations, cet ensemble de