Page:Revue de métaphysique et de morale, 1899.djvu/268

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
268
REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

l’hypothèse euclidienne ; mais elle en comporte une également dans l’hypothèse non-euclidienne. Eh bien, nous avons fait une série d’expériences ; nous les avons interprétées dans l’hypothèse euclidienne et nous avons reconnu que ces expériences ainsi interprétées ne violent pas cette « loi de relativité ».

Nous les interprétons maintenant dans l’hypothèse non-euclidienne cela est toujours possible ; seulement les distances non-euclidiennes de nos différents corps dans cette interprétation nouvelle ne seront généralement pas les mêmes que les distances euclidiennes dans l’interprétation primitive.

Nos expériences, interprétées de cette manière nouvelle, seront-elles encore d’accord avec notre « loi de relativité » ? Et si cet accord n’avait pas lieu, n’aurait-on pas encore le droit de dire que l’expérience a prouvé la fausseté de la géométrie non-euclidienne ?

Il est aisé de voir que cette crainte est vaine ; en effet, pour qu’on puisse appliquer la loi de relativité en toute rigueur, il faut l’appliquer à l’univers entier. Car si on considérait seulement une partie de cet univers, et si la position absolue de cette partie venait à varier, les distances aux autres corps de l’univers varieraient également, leur influence sur la partie de l’univers envisagée pourrait par conséquent augmenter ou diminuer, ce qui pourrait modifier les lois des phénomènes qui s’y passent.

Mais si notre système est l’univers entier, l’expérience est impuissante à nous renseigner sur sa position et son orientation absolues dans l’espace. Tout ce que nos instruments, si perfectionnés qu’ils soient, pourront nous faire connaître, ce sera l’état des diverses parties de l’univers et leurs distances mutuelles.

De sorte que notre loi de relativité pourra s’énoncer ainsi :

Les lectures que nous pourrons faire sur nos instruments, à un instant quelconque, dépendront seulement des lectures que nous aurions pu faire sur ces mêmes instruments à l’instant initial.

Or un pareil énoncé est indépendant de toute interprétation des expériences. Si la loi est vraie dans l’interprétation euclidienne, elle sera vraie aussi dans l’interprétation non-euclidienne.

Qu’on me permette à ce sujet une petite digression. J’ai parlé plus haut des données qui définissent la position des divers corps du système ; j’aurais dû parler également de celles qui définissent leurs vitesses ; j’aurais eu alors à distinguer la vitesse avec laquelle varient les distances mutuelles des divers corps ; et d’autre part les vitesses