Page:Revue de métaphysique et de morale - 2.djvu/199

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
187
CRITON.dialogue philosophique entre eudoxe et ariste

ariste. — Je l’ai accordé.

eudoxe. — Ainsi nous ne pouvons pas plus distinguer l’induction de la déduction que l’analyse de la synthése.

ariste. — Il me semble pourtant que deux mots différents n’existeraient pas s’il n’existait pas aussi deux méthodes, et qu’il faut admettre quelque différence entre analyse et synthèse, induction et déduction.

eudoxe. — Quelle différence ?

ariste. — Je ne saurais l’expliquer, mais je vous la rendrai sensible par des exemples.

eudoxe. — Quels exemples ?

ariste. — J’ai appris autrefois à distinguer l’analyse et la synthèse en géométrie comme deux méthodes inverses l’une de l’autre. La synthèse descend des principes aux conséquences ; l’analyse remonte des conséquences aux principes ; la synthèse nous conduit du simple au complexe, et l’analyse du complexe au simple. Et l’on me donnait comme exemples de ces deux méthodes si différentes deux théorèmes.

eudoxe. — Voyons lesquels.

ariste. — Quand je veux démontrer que le carré construit sur l’hypoténuse d’un triangle rectangle est égal à la somme des carrés construits sur les deux autres côtés, je suis la marche synthétique. Au contraire, lorsque je veux inscrire un hexagone régulier dans un cercle, je suis la marche analytique.

eudoxe. — Je me souviens d’avoir proposé à cet ami, dont je vous parlais, précisément ces deux exemples et voici ce qu’il me répondait : « Ces deux démonstrations, disait-il, sont de tout point identiques. Je commence par construire la figure entre les éléments de laquelle je veux saisir une relation ; c’est, d’une part, un triangle rectangle, avec les carrés construits sur ses côtés, d’autre part une circonférence avec un hexagone inscrit. Je cherche ensuite à construire dans ces figures des figures dont je connaisse déjà quelques propriétés. Ce sont, dans le premier cas, des rectangles et des triangles ayant deux & deux même base et même hauteur ; dans le second cas, un triangle isocèle dont je sais que les angles opposés aux côtés égaux sont égaux. Les propriétés de ces figures mettent en évidence les relations cherchées ; d’une part l’équivalence de chacun des petits carrés et d’un des deux rectangles qui composent le grand ; d’autre part l’égalité des trois angles du triangle isocèle