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revue de métaphysique et de morale.

davantage : la perception, c’est-à-dire le mouvement, l’activité, la liberté, dans le monde de la diversité et de l’opposition. C’est la loi profonde qui se révèle au dehors, dans la série des différents sens, depuis la première jusqu’à la dernière forme du tact, par le progrès de la symétrie et de l’indépendance des organes, de leur séparation dans l’espace, et en même temps de leur harmonie dans le mouvement.

C’est donc le développement en sens inverse de la passion et de l’action qui remplit la sphère de la conscience ; la conscience, la science même, est dans l’action et se développe avec elle ; mais l’action dans le mouvement, en contraste avec la passion. Au pôle supérieur de l’absolue activité, comme au pôle inférieur de la passivité absolue, la conscience, ou du moins la conscience distincte, n’est plus possible. Toute distinction et toute science s’absorbe dans l’impersonnalité.

II. Puisqu’il n’y a rien dans la conscience distincte que sous la condition générale du mouvement, et que le mouvement est dans le temps, la condition, l’être de la conscience est d’être dans le temps, Le temps est la première loi et la forme nécessaire de la conscience. Tout ce qui est dans la conscience est donc un changement ayant sa durée en un sujet qui dure et ne change point. Quel est donc le résultat, dans la sphère de la conscience, de la durée même du changement ?

On a vu que la passion et l’action (l’action dans le mouvement, du moins), sont partout, dans tout l’empire de la conscience, en sens et en raison inverse l’une de l’autre. La continuité ou la répétition de la passion l’affaiblit : la continuité ou la répétition de l’action l’exalte et la fortifie. La sensation prolongée ou répétée diminue par degrés et finit par s’éteindre. Le mouvement prolongé ou répété devient graduellement plus facile, plus rapide et plus assuré. La perception, qui est liée au mouvement, devient également plus claire, plus certaine, plus prompte[1].

Dans la conscience du mouvement même, il y a un élément de sensibilité : l’effort. L’effort diminue par la continuité et la répétition du mouvement.

  1. Destutt de Tracy, Élém. d’idéol., p. 217, 226. M. de Biran, Infl. de l’habitude, passim. Cf. Dugald Stewart, Philos. de l’espr. hum., II, 391. Butler, Analogie, etc., p. 122, 149. Bichat, Rech. sur la vie, art. v. Schrader, De consuetudine (1829, in-8), p. 6. La plupart des auteurs qui ont traité de l’habitude ont aperçu cette loi.