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gence et la volonté immédiates sont comme le moyen terme en mouvement dans toute l’étendue du milieu. Les extrêmes s’y touchent partout, le principe et la fin s’y confondent. Cette intelligence immédiate, c’est la pensée concrète où l’idée est confondue dans l’être. Cette volonté immédiate, c’est le désir, ou plutôt l’amour, qui possède et qui désire en même temps. Cette pensée et ce désir, cette idée substantialisée dans le mouvement de l’amour, c’est la Nature.

L’entendement et la volonté ne déterminent rien que de discret et d’abstrait. La nature fait la continuité concrète, la plénitude de la réalité.

La volonté se porte aux fins ; la nature suggère et fournit les moyens.

L’Art, œuvre de la volonté, n’a de prise que sur les limites, les dehors, les surfaces ; il n’a d’action que sur l’extériorité du monde mécanique, et d’instrument à lui que le mouvement. La nature travaille au dedans, et, jusque dans l’art, fait seule la profondeur et la solidité.

La Science, œuvre de l’entendement, trace et construit les contours généraux de l’idéalité des choses. La nature seule, dans l’expérience, en donne l’intégrité substantielle. La science circonscrit, sous l’unité extensive de la forme logique ou mathématique. La nature constitue, dans l’unité intensive, dynamique de la réalité[1].

Entre le dernier fonds de la nature et le plus haut point de la liberté réflexive, il y a une infinité de degrés qui mesurent les développements d’une seule et même puissance. Et à mesure qu’on s’élève, à mesure aussi augmente, avec la distinction et l’intervalle des contraires, l’étendue, condition de la science. C’est comme une spirale dont le principe réside dans la profondeur de la nature, et qui achève de s’épanouir dans la conscience.

C’est cette spirale que l’habitude redescend, et dont elle nous enseigne la génération et l’origine.

L’habitude est donc renfermée dans la région de la contrariété et du mouvement. Elle resté au-dessous de l’activité pure, de l’aperception simple, unité, identité divine de la pensée et de l’être ; et elle a pour limite et fin dernière l’identité imparfaite de idéal et du

  1. Sur l’opposition de la connaissance circonscriptive, et de la connaissance constitutive, cf. Kant, Crit. de la Rais. pure.