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SIMONIDE DE CÉOS[1]



Avec Simonide de Céos, nous arrivons à l’âge de perfection du lyrisme. Le fond et la forme, enrichis par toutes les tentatives précédentes, sont parvenus à leur plein développement. Une ode est un cadre où la pensée grecque, peu à peu mûrie, fait entrer à la fois, d’une manière harmonieuse, le mythe et la réalité, la fantaisie et la réflexion, l’éclat des images et le sérieux de la morale. Le style se prête avec une parfaite docilité à l’expression brillante et précise de toutes les idées. Les grandes réformes musicales sont accomplies, du moins pour un temps : on vit sur la tradition de Stésichore. Mais on apprend à en mieux user ; on perfectionne chaque invention dans le détail ; la strophe est maniée avec une maîtrise inconnue jusque-là : elle devient plus ample et plus magnifique. Simonide est un de ceux qui font le plus pour cet achèvement du lyrisme choral. C’est un esprit admirablement doué, que les circonstances favorisent. Il excelle dans l’élégie comme dans le lyrisme proprement dit. Il connaît tout, s’intéresse à tout : on lui attribuait l’invention de la mnémotechnie[2], l’introduction de lettres nouvelles dans l’alphabet[3]. C’est un homme de sagesse pratique et de raison, un conseiller écouté des puissants. Il est à la fois le favori des princes et l’ami des républiques. Aux yeux de la génération suivante, il reste comme un de

  1. Ce morceau sur Simonide de Céos fait partie du second volume de l’Histoire de la littérature grecque, destiné à paraître prochainement.
  2. Quintilien, XI, 2, 11 : Marbre de Paros, I, 70.
  3. Suidas, v. Σιμωνίδης.