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LES THERMES DE BROUSSE, EN NATOLIE

lens[1]. Mille ruisseaux, qui se jettent dans le Niloufer, la fertilisent et y nourrissent une végétation aussi puissante que celle des rivages de Trébisonde, et des campagnes si célèbres de Grenade et de l’Andalousie. Aussi, lors de l’expulsion des Maures de la contrée qu’ils nomment encore le Paradis terrestre, les tribus juives, qui partagèrent leur sort, et vinrent demander un asile aux Sultans Ottomans, crurent-elles avoir trouvé une nouvelle Grenade dans la ville hospitalière qui leur offrait les mêmes objets, les mêmes habitudes que cette terre chérie, quittée avec tant de larmes.

Mais, c’est au mûrier surtout que Brousse doit sa prospérité ; tout le monde y élève des vers-à-soie : le peuple y trouve des moyens assurés d’existence ; le propriétaire et le négociant fondent sur l’exploitation de cette branche d’industrie, la création ou l’augmentation de leur fortune.

Le bassin que parcourt le Niloufer[2] est borné au nord par une chaîne de hautes et riches collines qui le sépare du golfe de Moudania, et se rattache au Mont-Katyrli, au pied duquel, on admire le beau lac de Nicée.

En portant nos regards vers la droite, nous les reposons sur le tapis de verdure de Badamli-Baghtchè, que termine, en l’ombrageant, un bouquet de vieux noyers. Un ruisseau et une fontaine avivent ce reposoir ; le voyageur s’y assied avec

  1. Les fruits de Brousse sont justement renommés, surtout ceux du village de Dèmir-Tach, situé à deux lieues nord de cette ville. Les raisins, les fruits à noyaux, les cerises, les figues, les mûres, les marrons, les pommes et les poires y sont d’une qualité remarquable. L’art de la greffe y est pratiqué depuis un temps immémorial, et c’est de Brousse que la grande capitale retire la meilleure partie des jeunes arbres à fruit.
  2. Cette rivière, dont le cours va de l’est à l’ouest, se nomme Deli-Tchaï (le fleuve fou), à sa sortie des gorges du mont Olympe. Elle cause, en effet, de grands ravages dans la plaine de Brousse, et se répand à droite et à gauche, de manière à rendre marécageuses et incultes les portions de cette plaine, qui serait si fertile, et où les chaleurs de l’été développent des miasmes funestes à la santé des habitans.