Page:Revue des Deux Mondes - 1829 - tome 1.djvu/324

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
306
ANGLETERRE.

mander justice. Rappelons encore, à cet égard, le témoignage de M. Brougham ; voici comme il s’exprimait à la chambre des communes :

« Quelle garantie possédons-nous contre les abus de pouvoir d’un Magistrat ? On me dira que nous pouvons procéder contre lui par voie d’accusation, ou d’action au criminel. Mais par le temps qui court, quel homme serait assez déraisonnable pour venir accuser un Magistrat devant cette chambre ? autant vaudrait attaquer un ministre. Reste l’action au criminel !… Mais pour obtenir seulement une prise en considération, ne faut-il pas apporter la preuve que le Magistrat s’est laissé déterminer par de coupables motifs, et se fonder, non pas seulement sur les assertions des témoins, mais sur des faits qui établissent irrésistiblement la prévarication.

» La difficulté de prouver la corruption est presque insurmontable, parce que le Magistrat, pour se débarrasser de toute responsabilité, n’a qu’à adopter le parti bien simple de ne pas motiver sa décision, de ne dire absolument rien, et de garder pour lui ses raisons. Si vous ne pouvez pas faire voir qu’il a lui-même expliqué ses motifs, ou s’il n’y a pas quelques circonstances tout-à-fait accablantes contre lui, il ne vous est pas possible d’obtenir même une instruction sur l’affaire.

» La corruption dans un Magistrat, disait dernièrement un des recueils périodiques le plus estimés de l’Angleterre,[1], n’est pas seulement de la vénalité. L’amour de la vengeance, l’amour de l’oppression, sont aussi de la corruption. Cependant, dans beaucoup de cas d’une injustice si criante, que toute personne douée d’une dose ordinaire de raison et de sentiment eût déclaré que le Magistrat était le plus grand tyran du monde, la cour du banc du Roi s’est contentée

  1. London Magazine. Octobre 1828.