Page:Revue des Deux Mondes - 1829 - tome 1.djvu/50

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
36
TURQUIE.

place, et tous les Turcs notables se liguèrent à ces deux scélérats. Dans la nuit du 13 au 14 août, les corps de la garnison, en traversant par bandes la ville, brisèrent les portes des maisons grecques, et commencèrent un massacre général. On vit alors les Turcs de distinction remettre aux bourreaux leurs secrétaires et les domestiques grecs qu’ils avaient depuis plusieurs années. Cette boucherie dura pendant toute la journée du 14. Quelques femmes et enfans s’étant cachés dans des caisses, les assassins les en retirèrent pour les égorger : enfin le silence de la mort succéda au carnage.

» Tous les rapports que j’ai reçus s’accordent sur ce que le nombre des tués surpasse un millier. On trouva sur le bazar seulement jusqu’à deux cents cadavres. Il paraît que le visir de Candie, Cara Suleïman-Pacha, n’a pas donné son consentement au massacre ; mais n’ayant aucune autorité sur les Turcs indigènes, et manquant d’un corps de troupes placé directement sous ses ordres, il n’a pu l’empêcher. Depuis ce temps, les assassinats continuent sans cesse ; les Turcs parcourent par centaines les villages de la province de Scitia. Ces bandes tuent tout ce qu’elles rencontrent ; ni âge ni sexe ne sont épargnés.

» Aussitôt après avoir reçu les premiers rapports sur ces évènemens dans la partie méridionale de l’île, j’ai prié le capitaine sir T. Fellowes, commandant la frégate de S. M. B. le Dartmouth, alors en station dans le golfe de la Sude, de se rendre en Candie pour faire cesser le massacre. Sir T. Fellowes y trouva dans le palais du pacha l’évêque et les autres individus qui s’y étaient réfugiés.

» Suleïman-Pacha lui avoua franchement que l’émeute des troupes avait eu lieu contre sa volonté ; mais qu’il n’avait aucune autorité sur elles, puisqu’elles se trouvaient sans chef depuis la mort d’Agriolidi ; qu’il y avait réellement eu un petit nombre de gens tués, etc.

» Lorsqu’un Turc fait cet aveu à un officier d’une puissance