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UNE RENCONTRE DE BANDITS AU MEXIQUE.

bine à un des brigands, qui, en me portant la pointe de son sabre à la gorge, me demandait mes armes. Mais, au même instant, j’entendis une nouvelle décharge ; je sentis quelque chose de froid traverser ma poitrine, et je tombai parmi les corps inanimés de mes amis : je venais d’être atteint par une balle.

Les voleurs entourèrent la voiture, et donnèrent ordre au postillon d’avancer. Je souffrais horriblement ; mais malgré mes douleurs, je ne tardai pas à faire de cruelles réflexions sur la position dans laquelle je me trouvais, sur les dangers dont j’étais menacé, et que me rappelait le spectacle placé sous mes yeux. N… par suite des cahots de la voiture, avait glissé dans le fond, et gisait inerte à côté de moi. R… vivait encore, quoique son sang coulât par sept blessures. Je ne pouvais détacher mes regards de cette figure que je voyais lutter contre les angoisses de la mort. La respiration s’affaiblit insensiblement, et finit par s’arrêter tout-à-fait. Le malheureux ouvrit les yeux et expira. Quant à moi, m’apercevant que mon sang s’échappait à gros bouillons de ma blessure, je m’efforçai de l’étancher en ramenant mes habits sur ma poitrine. Ce mouvement attira l’attention de deux femmes de notre société, qui, n’ayant pas été blessées, remerciaient à voix basse Dieu et tous les saints de cette faveur, et qui me recommandèrent de ne pas bouger. Je demeurai, en effet, immobile pendant quelques instans, prêtant l’oreille aux pieuses expressions de leur ferveur, qui me donnèrent l’idée d’invoquer le ciel pour la conservation de mes jours. Je