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Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 1.djvu/476

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VARIÉTÉS.

tentes contre la violence du vent, qui avait déjà menacé de les enlever ; d’autres préparaient la tourbe qui servait à la cuisson des alimens, tandis qu’on envoyait des détachemens chercher les chevaux et le gibier qui avaient été tués au loin. C’était toujours le travail le plus fatigant que de marcher chargé sur un sol inégal, couvert d’herbes et de trous. Les charpentiers, les serruriers travaillaient au canot qui devait bientôt partir.

Cependant je passai des nuits bien calmes sous la tente, travaillant à la lueur de ma lampe de coquille, alimentée par l’huile de phoque. Je me souviendrai toujours du plaisir que j’éprouvai à lire les Entretiens d’Eudoxe, que je ne connaissais pas. L’auteur a mis dans cet ouvrage d’éducation toute la sagesse de sa longue vie. Si jamais ces lignes jetées au hasard lui parviennent, il éprouvera peut-être quelque satisfaction d’apprendre que son livre a pu distraire un instant d’une des plus terribles positions dans laquelle on puisse se trouver.

Il y avait parmi l’équipage un homme avec lequel j’aimais beaucoup à m’entretenir. C’était pour nous le représentant de la valeur française sous la république. Il avait fait les campagnes d’Italie et d’Égypte. Il avait été sergent de grenadiers dans cette fameuse 32e demi-brigade, qui, dans les circonstances difficiles, permettait au général en chef de dormir tranquille. Et voilà que maintenant, après bien des vicissitudes, après avoir échappé à cent combats, il se trouve au déclin de ses jours naufragé sur une île déserte.

Le séjour des vaisseaux ne lui avait rien ôté de son air martial, pas même fait fléchir la rectitude de sa taille. Sa parole était brève et rapide comme une évolution, et il saluait constamment de la main en militaire. Il savait apprécier ce qu’il avait fait, et n’ignorait pas ce qu’il aurait pu être. Ses observations étaient consignées dans un journal qu’il tenait assez régulièrement.

Un jour (c’était pour nous un dimanche), couchés sur