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L’ESPAGNE TELLE QU’ELLE EST.

plus irritante de toute l’Espagne. Le vent, qui y souffle presque toute l’année des montagnes de Guadarama, et dont les funestes effets ont donné lieu à tant de proverbes, pénètre d’un froid insupportable, qui affecterait les poitrines les plus fortes si elles n’étaient garanties par le pan du manteau jeté sur l’épaule, comme il ajoute à l’influence du climat pour donner la plus douloureuse colique à un grand nombre d’étrangers. C’est ce vent si fréquent, et quelquefois si impétueux depuis le mois de février jusqu’au mois de mai, qui, élevant sans cesse dans les airs des tourbillons d’une poussière nitreuse, irrite les yeux d’une population entachée des vices scrophuleux et vénériens, et donne lieu à ces ophthalmies que la réverbération du soleil et la fraîcheur des nuits doivent plus tard rendre funestes. Ce n’est pas seulement à Madrid que cette affection est remarquable ; les maladies et la perte des yeux sont une plaie de toute l’Espagne, à en juger par ce qu’on rencontre jusqu’à Cadix, parce que l’irritante atmosphère de la Péninsule est généralement très-agitée, et que l’ardeur des rayons solaires n’est presque pas tempérée par la verdure, dont plusieurs contrées manquent entièrement. »

En résumé, l’ophtalmie en Espagne est produite par les mêmes causes qu’en Égypte, par cette poudre[1] nitreuse impalpable, qui assiége les yeux et y détermine l’inflammation. Elle est de plus aggravée par des alternatives continuelles de chaleurs excessives pendant le jour, et de froid aigu pendant la nuit. Les coliques de Madrid, qui sont aussi un effet du climat, sont toujours dangereuses et souvent fatales aux étrangers. Ils apprennent, quelquefois trop tard, à se prémunir contre les vents glacés, qui, en répercutant une transpiration abondante, enfantent cette terrible maladie. Les af-

  1. On peut affirmer, dit Minano, qu’un tiers de l’Espagne et la poussière des routes des provinces orientales et méridionales du royaume fourniraient du nitre au monde entier, s’il plaisait à la Providence de l’anéantir sur toute la surface du globe. (Dic. Georg. I. Madrid, 1826).