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RÉVOLUTIONS DE LA QUINZAINE.

ses haches, deux villes se disputent à qui possédera M. de Norvins, le poème sur l’immortalité de l’âme et l’histoire de Napoléon ; c’est avoir grande envie de se disputer, n’est-ce pas ?

La quinzaine dont je parle est surtout remarquable par les procès importans qui ont occupé le jury et les tribunaux civils. Le procès politique a donné, puis le procès à grand scandale. Le mois a dignement commencé par l’acquittement du National. Lors de l’émeute des chapeaux gris, le National avait signalé à l’indignation publique une compagnie d’assommeurs stipendiés par la police pour maintenir le bon ordre parmi les républicains, les ouvriers enrégimentés assommaient partiellement quiconque sentait tant soit peu la république. Il y eut des attentats atroces commis par ces misérables sur les personnes ; le National parla avec ardeur contre cette nouvelle manière de rétablir l’ordre, et dénonça ces tristes menées. Il démasqua cette police de troisième ordre en veste et en casquette d’ouvriers ; la dénonciation du National fit pâlir le ministère. Le ministère s’imagina qu’il était de bon ton et de bon goût de faire un procès au chaleureux écrivain. Procès, citations téméraires ! Quand les témoins arrivent, l’affaire change de face. On rencontre des voituriers qui tiennent table ouverte par amour pour la patrie ; il y a des hommes qui distribuent gratis des rubans par amour pour la patrie, d’autres qui promettent un écu aux ouvriers de bonne volonté par amour pour la patrie ; les témoins du ministère balbutient et se troublent ; l’ancien préfet de police, M. Vivien, se désiste de sa plainte personnelle ; un maire de Paris, qui avait chargé le National la veille, revient le lendemain sur sa déposition. Alors l’opinion publique, ce grand juge de toutes les choses de ce monde, prononce l’acquittement du National, le tribunal confirme l’arrêt. C’est encore une fort mauvaise affaire pour le ministère. Le ministère pourra la mettre dans ses archives à côté de l’affaire si malheureuse des fusils-Gisquet.

En même temps, la prétendue conjuration de La Rochelle, cette affaire de carlistes, ce grand danger découvert, ce procès si solennel sous le titre Conspiration de La Rochelle, qui nous rappelle tant de souvenirs de sang, avait le même résultat que l’affaire du National ; les accusés étaient renvoyés de la plainte. Il serait temps enfin que le gouvernement prît garde à cela, à savoir qu’il n’est pas bon de s’exposer à perdre beaucoup de procès ; qu’il n’est