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LE MANUSCRIT VERT,
PAR
GUSTAVE DROUINEAU.[1]

M. Gustave Drouineau n’est pas content de la société moderne, et cela se conçoit sans peine. Je sais des colères très excusables, et qui n’ont pas à faire valoir, pour qu’on les accepte, les mêmes griefs ; je trouve donc tout simple que l’auteur du Manuscrit vert se scandalise des vices qu’il coudoie tous les jours, qu’il prenne feu et fureur à la vue des crimes de tous genres qui se multiplient dans une grande ville aussi facilement, aussi fatalement que la glace se brise, se broie et se fond sous le pied des passans, sous la roue des calèches et des fiacres.

Le chicaner sur son indignation et son mépris, ce serait vraiment ne pas savoir vivre, et à moins d’être sorti la veille du couvent ou du collège, et d’avoir quitté depuis vingt-quatre heures seulement l’Évangile ou le De officiis, on aurait mauvaise grâce à ne pas prendre M. Drouineau pour ce qu’il est, à ne pas comprendre du premier coup la mission qu’il s’est donnée et qu’il commence.

Quant au courage qu’il s’attribue dans l’accomplissement de sa mission, je l’en remercie de grand cœur, car il a pu croire, en traçant les premières lignes de son livre, qu’il allait au-devant du ridicule, et que chacune de ses paroles religieuses et austères serait suivie du glapissement d’une raillerie

  1. 2 vol. in-8o, chez Charles Gosselin, rue Saint-Germain-des-Prés.