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exagérés et ses peintures forcées des vieilles habitudes anglaises, ne vaut pas assurément les précieux croquis et les charges curieuses de Salmagundi[1].

Il faut pourtant le reconnaître, Washington Irving s’est livré à de consciencieuses études sur l’Espagne et quelques-unes des parties les plus intéressantes de son histoire. La Conquête de Grenade et surtout la Vie et les Voyages de Christophe Colomb, et les Voyages et découvertes des compagnons de Colomb, sont des ouvrages fort estimables, et qui ne seraient point passés inaperçus, fussent-ils sortis de la plume d’un auteur moins connu. Les deux derniers étaient même tout-à-fait de son ressort et se rattachaient particulièrement à l’histoire de son Amérique : aussi nous semblent-ils fort supérieurs à la Conquête de Grenade.

Un nouvel ouvrage sur l’Espagne vient d’être encore tout récemment publié par Washington Irving. Celui-ci n’a rien de sérieusement historique : c’est un recueil de contes et d’esquisses, comme son premier Sketch Book, comme ses Tales of a traveller. Washington Irving excelle dans les tableaux de genre, et l’Alhambra n’est autre chose qu’une galerie de ces tableaux. Plusieurs sont touchés avec grâce et délicatesse, et vraiment fort jolis. Il y a d’ailleurs, dans ce livre, des vues d’Espagne finement dessinées, des paysages bien indiqués, une observation parfois superficielle et incomplète peut-être, mais spirituelle et bienveillante, en général, une appréciation assez vraie du pays et de ses mœurs, sinon un sentiment bien vif et bien profond de sa poésie.

En somme, ce livre mérite vraiment d’être lu. Comme la traduction n’en est pas encore publiée, en le parcourant avec nos lecteurs, nous allons leur en donner quelques extraits.

L’auteur raconte d’abord son voyage, à travers le centre de l’Espagne : c’est peut-être la meilleure partie de son livre ; elle renferme des portraits et des tableaux pleins d’exactitude et de vérité. Nous en citerons seulement quelques lignes qui pei-

  1. Washington Irving a débuté par des essais insérés dans un recueil périodique qui se publiait à New-York, sous le titre de Salmagundi.