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EXCURSION DANS L’OYAPOCK.

danseurs arrivent, dans la croyance que celui d’entre eux qui les verrait le premier mourrait infailliblement dans l’année : nous ne découvrîmes aucune trace de cette superstition. La danse ordinaire des Indiens ne consiste pas, comme la nôtre, en une suite de pas et de figures gracieuses : ce n’est qu’une marche monotone pendant laquelle les danseurs, placés à la file les uns des autres, ont chacun leur main gauche posée sur l’épaule de celui qui précède ; la droite porte la flûte, et chaque danseuse tient son danseur embrassé, en lui passant le bras droit autour du corps. Une partie des instrumens commence un air lugubre, que les autres terminent, tandis que l’Indien qui porte les grelots d’ahouaye marque la mesure, en frappant avec force la terre du pied. À chaque pas, les danseurs se retournent à moitié, et s’inclinent comme s’ils se saluaient les uns les autres. Ces danses, exécutées la nuit, à la lueur de torches d’un bois résineux, que tiennent les spectateurs, ont quelque chose de fantastique et d’infernal, qu’il est impossible de décrire.

Outre cette danse, les Indiens en ont d’autres qui sont des espèces de pantomimes, et qui consistent à imiter les gestes de divers animaux dont elles portent le nom. Ainsi, il y a la danse du macaque, celle du toucan, du maïpouri ou tapir, du serpent, etc. Chaque danseur monte tour-à-tour sur une petite estrade, dressée à dessein, et joue son rôle, pendant que les autres tournent à l’entour en exécutant la marche que je viens de décrire, au son des instrumens. Tels sont, avec les orgies dont j’ai parlé plus haut, les seuls divertissemens des Indiens.

Le courage avec lequel ils supportent sans se plaindre les douleurs et la mort, a souvent fait l’admiration des voyageurs. Un des fils de Tapaïarwar nous en offrit un exemple. Il était affecté d’un dépôt dans l’oreille, qui lui causait les souffrances les plus aiguës, sans qu’il lui échappât la moindre plainte. Toute la famille ne paraissait nullement s’en occuper, et se contentait de mettre un peu de nourriture à côté de son hamac, quand elle prenait ses repas. Son mal paraissait incurable, et il a dû y succomber peu de temps après notre départ. À cette occasion, je pris de nouvelles informations auprès des Indiens sur la coutume