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tomba, abattant la main gauche du duc, et du même coup lui fendant la tête depuis la pommette de la joue jusqu’au bas du menton.

Le duc resta encore un instant debout, comme un chêne qui ne peut tomber ; alors Robert de Loire lui plongea son poignard dans la gorge, et l’y laissa.

Le duc jeta un cri, étendit les bras, et alla tomber aux pieds de Gyac.

Il y eut alors une grande clameur et une affreuse mêlée, car dans cette tente où deux hommes auraient eu à peine de la place pour se battre, vingt hommes se ruèrent les uns sur les autres. Un moment, on ne put distinguer au-dessus de toutes ces têtes que des mains, des haches et des épées. Les Français criaient : Tue ! tue ! à mort ! Les Bourguignons criaient : Trahison ! trahison ! alarme ! Les étincelles jaillissaient des armes qui se rencontraient, le sang s’élançait des blessures. Le Dauphin, épouvanté, s’était jeté le haut du corps en dehors de la barrière. À ses cris, le président Louvet arriva, le prit par-dessous les épaules, le tira dehors, et l’entraîna presque évanoui vers la ville ; sa robe de velours bleu était toute ruisselante du sang du duc de Bourgogne, qui avait rejailli jusque sur lui.

Cependant le sire de Montaigu, qui était au duc, était parvenu à escalader la barrière, et criait : Alarme ! De Noailles allait la franchir aussi, lorsque Narbonne lui fendit le derrière de la tête ; il tomba hors de la tente, et expira presque aussitôt. Le seigneur de Saint-Georges était profondément blessé au côté droit d’un coup de pointe de hache ; le seigneur d’Ancre avait la main fendue.

Cependant le combat et les cris continuaient dans la tente ; on marchait sur le duc mourant, que nul ne songeait à secourir. Jusqu’alors, les Dauphinois, mieux armés, avaient le dessus ; mais aux cris du seigneur de Montaigu, Antoine de Thoulongeon, Simon Othelimer, Sambutier et Jean d’Ermay accoururent, s’approchèrent de la loge, et tandis que trois d’entre eux dardaient leurs épées à ceux du dedans, le quatrième rompait la barrière. De leur côté, les hommes cachés dans la maison sortirent et arrivèrent en aide aux Dauphinois. Les Bourgui-