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IL PIANTO.

Nos crocs ne seront plus chargés d’étoupes molles,
Viendront les pensers forts et les mâles paroles.
Après avoir eu l’os, nous aurons de la chair,
Les douceurs du printemps après le vent d’hiver.
Aussi je prends courage, au branle de la rame
Je poursuis plus gaîment le poisson sous la lame,
D’un bras ferme et hardi je lance mes harpons,
Je nage à tous les bords, je plonge à tous les fonds,
Car je sais un beau jour, et sans que rien l’empêche,
Qu’en mon golfe divin je ferai bonne pêche :
Aux bords de Chiaia, sur ce sable argenté,
Dans mes larges filets viendra la Liberté.

SAVATOR.

La Liberté, pêcheur ! la Liberté divine
Poserait ses pieds blancs sur ta poupe marine !
Cette sœur de Vénus, cette fille des flots,
Dans Naples descendrait des bras des matelots !
Oh ! j’ai bien peur, ami, que ta voix taciturne
Ne chante faussement comme l’oiseau nocturne.
La Liberté céleste aime les beaux rameurs ;
Mais elle goûte peu nos oisives humeurs,
Sa robe est relevée, et belle voyageuse,
Pour notre peuple elle est trop rude et trop marcheuse.
Sybarite au poil noir et gras voluptueux,
Adorateur sacré du parmesan glueux,
Il a le cœur au ventre, et le ventre à la tête.
Manger, boire, dormir, voilà toute sa fête,