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fait à peu près ruiné de la civilisation de la Grèce par l’Égypte. Mais, si l’historien se trouve en défaut sur ce point éloigné, nous doutons qu’on puisse le reprendre souvent dans le champ même du récit qu’il a si attentivement parcouru : c’est un guide scrupuleux et sûr, et son travail abonde en notions positives.


FRITHIOF, PAR M. ISAÏE TEGNER, ÉVÊQUE DE WEXIOE.

La littérature suédoise, long-temps vouée à l’imitation des littératures étrangères, vient enfin, depuis une vingtaine d’années, de se rappeler qu’une autre carrière, une carrière patriotique lui était ouverte ; que la mythologie, les traditions, les mœurs antiques du pays, étaient des sources abondantes, où elle pourrait puiser l’originalité dont la plupart de ses travaux étaient dépourvus. L’attention du public et des écrivains s’est reportée avec ardeur vers les contes (saga) scandinaves. Leur énergie, leur naïveté, ont ému l’imagination des jeunes poètes ; ils ont essayé de les prendre pour sujets de leurs compositions nouvelles. M. Isaïe Tegner est sans contredit, celui de tous qui a le mieux réussi dans cette tentative. Il s’est approprié le conte de Frithiof, que l’on croit du neuvième siècle, et en a tiré un poème en vingt-quatre chants, qui fait, depuis neuf ans, la gloire de la littérature suédoise moderne. Quatre éditions consécutives ont à peine suffi à l’empressement des lecteurs. Tous les Suédois, n’importe leur rang, ont pour Frithiof le plus vif enthousiasme ; la musique, la peinture se sont empressées de lui apporter leur tribut. C’est, en un mot, un poème populaire sur un sujet national, une peinture fidèle des mœurs antiques de la Scandinavie.

Frithiof, fils du paysan Thorsten Vikingsson, est élevé chez Hilding avec Ingeborg, fille de Bele, roi de Norwège. Frithiof ressemble au chêne, Ingeborg à la rose au montent où le printemps fuit ; bientôt aux jeux de l’enfance succède l’amour, transition exprimée par l’auteur avec une simplicité remplie de charme. C’est en vain qu’Hilding rappelle à son fils adoptif qu’Ingeborg est de sang royal, que sa race remonte à Oden, Frithiof oppose sa force,