Page:Revue des Deux Mondes - 1833 - tome 2.djvu/87

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
81
ÉCONOMIE POLITIQUE.

contrebande. Il est presque inutile de demander ce que deviendrait le commerce sous un régime où pour déguiser ses profits, il serait contraint de multiplier ses frais et ses risques, en faisant passer les marchandises sujettes à certaines inspections, en une infinité de petits ballots.


De l’impôt progressif sur les successions, sur les droits d’enregistrement, et le revenu public en général.


On a calculé que la totalité des patrimoines change de main par successions, donations entre-vifs et autres titres gratuits, une fois tous les trente ans. C’est donc le trentième de la richesse nationale qu’on peut annuellement saisir comme matière imposable.

Assurément aucune branche d’impôt ne comporte mieux que les successions ou donations entre-vifs, des taxes graduées, qui portent, dans ces cas, sur les ressources les plus incontestables, et réduisent d’avance des fortunes dont on n’a pas encore l’habitude de jouir. Cependant, puisque la perception du trésor se fait nécessairement par préférence à tous les autres créanciers d’une succession, même hypothécaires ou privilégiés, un tel privilège de l’état doit faire hausser l’intérêt exigé par les prêteurs, en raison de la quotité de l’impôt, car celui qui prête impose un intérêt plus élevé à mesure qu’il court de plus grands risques. D’un autre côté, quand l’impôt excède une année du revenu des successions, il réduit ordinairement ceux qui héritent à emprunter pour acquitter ce qu’ils doivent.

De là un accroissement du nombre des emprunteurs et une nouvelle cause d’élévation dans le taux de l’intérêt de l’argent.

Ces divers effets de l’impôt progressif, ajoutés à tout ce que le besoin de s’y soustraire provoquerait de fraudes et de collusions, réduiraient indéfiniment la valeur vénale des biens-fonds, et par conséquent le revenu public.

Le défaut de concurrence des acheteurs et l’excessive concurrence des vendeurs contribueraient encore à l’avilissement du prix des immeubles. En effet, un impôt progressif sur les successions détacherait un grand nombre de propriétaires de tout bien immobilier, et forcerait beaucoup d’héritiers à s’en dessaisir immédiatement. Or les biens-fonds ne peuvent être ainsi dépréciés, sans que