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DE LA CHINE.

détails sur ces négociations, que la légèreté sceptique de quelques historiens avait niées. Entamées par les papes et les rois de France, elles eurent d’abord un succès médiocre auprès des chefs tartares ; puis quand ils comprirent que les intérêts de leur conquête étaient d’accord avec les plans de croisade que l’Europe chrétienne commençait à abandonner, ce furent eux, chose étrange, qui tentèrent par leurs messages de ranimer cet enthousiasme. Alors ils prirent l’initiative des ambassades, écrivant en termes courtois, et ne menaçant plus comme auparavant les missionnaires d’envoyer au pape leur peau empaillée, mais offrant au roi de France le secours de leur cavalerie pour conquérir le Saint-Sépulcre. M. Rémusat a rattaché à l’histoire de ces singulières ambassades, des vues ingénieuses sur les relations, beaucoup plus nombreuses qu’on ne le suppose souvent, qui liaient et rapprochaient au moyen âge l’Orient et l’Occident. Dans le morceau suivant, il a groupé un grand nombre de faits, dont le simple exposé frappe vivement l’imagination. Les vues qui suivent sont pleines d’élévation et de nouveauté. Je ne puis résister à transcrire le morceau tout entier ; je ne crains point qu’il paraisse trop long à mes lecteurs, et nul autre ne me semble plus propre à leur donner idée du talent d’écrire de M. Rémusat, qu’une notice consacrée à sa mémoire doit faire aussi connaître.

« Beaucoup de religieux italiens, français, flamands furent chargés de missions diplomatiques auprès du grand Khan. Des Mongols de distinction vinrent à Rome, à Barcelone, à Valence, à Lyon, à Paris, à Londres, à Northampton, et un franciscain du royaume de Naples fut archevêque de Pékin. Son successeur fut un professeur de la faculté de théologie de Paris. Mais combien d’autres personnages moins connus furent entraînés à la suite de ceux-là, ou comme esclaves, ou attirés par l’appât du gain, ou guidés par la curiosité dans des contrées jusque-là inconnues ! Le hasard a conservé le nom de quelques-uns ; le premier envoyé qui vint trouver le roi de Hongrie de la part des Tartares, était un Anglais banni de son pays pour certains crimes, et qui, après avoir erré dans toute l’Asie, avait fini par prendre du service chez les Mongols. Un cordonnier flamand rencontra dans le fond de la Tartarie une femme nommée Paquette,