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DE LA CHINE.

terre qui fait partie d’un plus vaste système. » En lisant tout cela, on est pris de vertige. C’est comme si les profondeurs de l’espace s’ouvraient, et que l’on vît tous les mondes, immense essaim de lueurs, tournoyer en bourdonnant dans l’infini.

Sans doute la fixation de ces nombres est une chose absurde en elle-même ; mais, comme le remarquait très bien M. Rémusat, ils servent à faire entrer l’idée de l’immensité dans des esprits grossiers, à qui un mot abstrait ne dirait rien, et où elle s’insinue à la faveur de cette prodigalité de millions et de milliards qui nous semble ridicule.

Il se passe dans le temps l’équivalent de ce que nous avons trouvé dans l’espace. Le temps est divisé par les bouddhistes en périodes qui se suivent, comme l’espace en mondes qui se touchent.

Ces périodes ou kalpas sont composées d’un grand nombre d’années dont, comme on peut croire, ils savent le compte. Un kalpa, ou la vie d’un monde, contient quatre époques. Dans la première, le monde se forme et s’établit. Les êtres sont alors dans la région des formes ; mais à mesure que le temps s’écoule, la vertu de Bouddha, de l’essence suprême, qui, en se communiquant, donna l’être ou au moins cette apparence d’être, qui est l’existence, la vertu de Bouddha s’affaiblit dans ses manifestations, et tout commence à décliner ; les êtres descendent du monde des formes dans le monde des désirs. D’abord parfaitement purs, la sensualité s’éveille en eux, dès qu’ils ont goûté une eau qui jaillit, douce comme le miel et la crème ; bien que cette sensualité soit encore délicate, leur splendeur commence à pâlir ; ensuite ils mangent un aliment plus grossier, et avec les sexes se développent en eux toutes les dispositions violentes et passionnées ; ils sont précipités dans la servitude et le trouble des sens.

Puis la chute est suspendue, l’univers est dans un état stationnaire qui dure un certain temps.

Mais bientôt il recommence à déchoir ; sa destruction approche, elle est annoncée par des ouragans, des incendies, des cataclysmes qui atteignent, en montant, un étage du monde, et puis l’autre ; enfin, le bien tarissant de jour en jour davantage, et le mal gagnant toujours, arrive le grand incendie, et en sept jours, toutes les mauvaises conditions sont détruites, c’est-à-dire les brutes, les