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HOMMES D’ÉTAT DE L’ANGLETERRE.

catholique du sud et de l’ouest s’en empara. À Dublin même, où, depuis si long-temps, les membres des corporations protestantes avaient disposé souverainement des élections, et fêté, le verre à la main, les membres de leur choix, en buvant à la santé du roi Guillaume, on vit O’Connell et M. Ruthven, un de ses satellites, l’emporter sur leurs adversaires et devenir les représentans de la capitale de l’Irlande.

Les membres irlandais de la chambre des communes offrent l’image exacte de la situation du pays et des partis qui le divisent. On peut compter en Irlande de 15 à 18 cent mille protestans. Dans les provinces de Leinster, de Munster et de Connaught, la masse protestante se compose principalement de la noblesse, de ses parens, de ses domestiques, de ses alentours et des commerçans des grandes villes. Dans l’Ulster, la province la plus septentrionale de l’Irlande, la moitié des paysans et des ouvriers habitant les villes de manufactures se rattachent à différentes sectes protestantes. Ce sont là les ennemis d’O’Connell, qui, de son côté, soutenu par les prêtres, sert de guide et de chef aux quatre cinquièmes de la population, sans que cette masse corresponde, à beaucoup près, aux quatre cinquièmes de la richesse et de l’industrie nationales. En vain a-t-il essayé d’attirer à son parti les Irlandais protestans ; à peine un seul d’entre eux s’est-il déclaré favorable à l’indépendance définitive de l’Irlande.

Si la représentation de ce pays à la chambre des communes était proportionnelle à sa population, le tiers de la chambre des communes se composerait d’Irlandais. Ce nombre se réduirait à peine à un dixième, si la représentation se proportionnait à la somme d’impôts versés par l’Irlande dans le trésor public. On a choisi un moyen terme entre ces deux extrêmes, et les membres irlandais, au nombre décent, forment à peu près un sixième de la chambre. Vingt-cinq ou trente de ces membres représentent les vieilles doctrines protestantes : ce sont les tories de la couleur la plus prononcée, adversaires violens du ministère actuel, poussant l’intolérance jusqu’à la fureur, jusqu’à l’absurdité ; car en Irlande l’exagération est commune, et les ultra de tous les partis sont plus véhémens et moins sincères qu’en Angleterre. Trente ou quarante autres membres sont des libéraux de nuances diverses, qui soutiennent le gouverne-