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ennemi[1]. Le roi Hilperik n’eut pas de peine à rassembler entre Paris et Soissons des forces plus considérables. Il marcha sur-le-champ au secours de la ville assiégée ; mais toujours circonspect, au lieu d’attaquer vivement les Austrasiens, il se contenta de leur montrer ses troupes et de leur envoyer un message, espérant qu’ils se retireraient sans combat. Godewin et ses compagnons répondirent qu’ils étaient là pour se battre. Mais ils se battirent mal ; et Hilperik, vainqueur pour la première fois, entra joyeux dans la capitale de son royaume[2].

Cette joie fut pour lui de courte durée, et de graves réflexions ne tardèrent pas à le rendre inquiet et soucieux. Il lui vint à l’esprit que la tentative des Austrasiens contre Soissons était le résultat d’un complot tramé par les intrigues de Brunehilde, que Merowig en avait eu connaissance, qu’il y avait trempé, et que son air de soumission et de bonne foi n’était qu’un masque d’hypocrisie[3]. Fredegonde saisit le moment pour envenimer par des insinuations perfides la conduite imprudente du jeune homme. Elle lui prêta de grands desseins dont il était incapable, l’ambition de détrôner son père, et de régner sur toute la Gaule avec la femme qui venait de s’unir à lui par un mariage incestueux. Grâce à ses adroites manœuvres, les soupçons et la défiance du roi s’accrurent au point de devenir une sorte de terreur panique. S’imaginant que sa vie était en péril par la présence de son fils, il lui fit enlever ses armes, et

  1. Collecti aliqui de Campaniâ, Suessionas urbem adgrediuntur, fugatâque ex eà Fredegonde reginâ, atque Chlodovecho filio Chilperici, volebant sibi subdere civitatem… Godinus autem caput belli istius fuit… Greg. Turon. Hist., lib. v, pag. 233. — Siggo quoque referendarius… ad Childebertum regem Sigiberti filium relicto Chilperico transivit. Ibid. pag. 234.
  2. Quod ut Chilpericus rex comperit, cum exercitu illùc direxit, mittens nuntios ne sibi injuriam facerent… Illi autem hæc negligentes, præparantur ad bellum, commissoque prælio invaluit pars Chilperici… Fugatisque reliquis, Suessionas ingreditur, Ibid.
  3. Quæ postquam acta sunt, rex propter conjugationem Brunichildis, suspectum habere cœpit Merovechum filium suum dicens, hoc prælium ejus nequitiâ surexisse, Ibid.