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NAPOLÉON.


v.


Non, la nouvelle avait menti,
Le clairon trop tôt retenti,
Non, la tombe s’était trompée
Avec le casque, avec l’épée.
Il n’est pas mort ! il n’est pas mort !
Il demeure en un château fort,
Tout de fer bâti jusqu’au faîte.
Toute entière la salle est faite
Avec le bronze du canon ;
Et sa colonne, qui se lève
Debout sur le seuil comme un rêve,
Est aussi haute que son nom.
Comme l’hôte sur le balcon,
L’orage avec sa froide haleine,
Va, vient, se penche et se promène.
Tous les cent ans, quand dort l’écho,
La nuit, son sabre de bataille,
Qui pend tout nu sur la muraille,
Frappe l’heure de Marengo ;
Et de vautours une nuée,
En voletant autour du bord,
Pensent entre eux : Voilà l’épée ;
Voyez ! Mais où donc est le mort ?

Le mort ? il vit dans son armée
Sous le toit de sa renommée.
Autour de lui ses maréchaux
Font caracoler leurs chevaux.
Ses vieux soldats des Pyramides
Sortent de leurs tombes humides,
Et par des chemins inconnus
Jusqu’à son camp ils sont venus.
Chaque soir sous la pâle nue,
Des morts il passe la revue.
Les vieux étendards il salue,