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porta en masse à la Casbah, comme auparavant les janissaires. Le dey se soumit ; une capitulation fut conclue le 5 juillet. Elle garantissait aux habitans que leur religion, leurs mœurs, leurs propriétés, seraient respectées, et le lendemain l’armée entra dans la ville[1]. Ce fut sous ces auspices que le général Danremont fut envoyé à Oran au commencement d’août : il y arriva avec onze cents hommes, et y fut accueilli par les habitans avec un empressement dont son administration juste et modérée ne les fit pas repentir : son influence pénétra dans l’intérieur des terres ; les Turcs passèrent à notre service, et nous gardèrent Mostaganem et Mascara. Dans la province de Bône, l’avenir, protégé par les souvenirs du passé, ne promettait que succès faciles ; les populations n’avaient point oublié les avantages qu’elles avaient recueillis, malgré l’oppression des beys, de leurs relations avec les anciennes concessions françaises, et ce qui se passe aujourd’hui prouve combien il y avait peu à faire pour les attirer à nous.

Les espérances des premiers jours de la conquête s’évanouirent bientôt ; les Maures, les Arabes, témoignèrent, chacun à leur manière, des dispositions hostiles : notre autorité fut en décadence, et dans bien des circonstances nous fîmes regretter au pays l’administration des Turcs.

La justification de ces paroles ne serait que trop aisée : elles sont bien pâles auprès des enquêtes et des procès-verbaux de la commission d’Afrique. Mais mon intention n’est point de remuer des griefs qui ne sont propres qu’à éloigner la réconciliation entre la France et l’Afrique ; et quoique la justice et la politique nous indiquent bien des maux à réparer, j’aime mieux détourner les yeux et aborder, comme il aurait fallu le faire en 1830, les questions que j’ai commencé par poser.

Deux opinions extrêmes se sont jusqu’à présent nettement prononcées sur l’avenir d’Alger : l’une tend à l’abandon, l’autre à la

  1. Art. 5 de la capitulation. « L’exercice de la religion mahométane restera libre ; la liberté des habitans de toutes les classes, leur religion, leurs propriétés, leur commerce et leur industrie ne recevront aucune atteinte ; leurs femmes seront respectées, le général en chef en prend l’engagement sur l’honneur. (Moniteur du 13 juillet 1830).