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précis, les historiens du Brésil n’ont parlé qu’en termes généraux des expéditions de cette peuplade ; on peut juger seulement, par la foule de mines dont ils lui attribuent la découverte, combien elles furent nombreuses. Le reste se trouve dans l’histoire des Missions, que les Paulistas envahissaient souvent, ainsi que nous l’avons vu plus haut. On chercherait vainement dans ces récits quelques traces d’itinéraires d’une précision satisfaisante, et encore moins d’aventures personnelles ; on ne peut que deviner, par la nature et l’audace de ces entreprises, les épisodes romanesques dont elles devaient être remplies.

Je dois donc m’estimer heureux d’avoir fait, pendant mon séjour au Brésil, la connaissance d’un vénérable père du couvent de San-Bento de Rio-Janeiro, homme instruit, curieux surtout de vieilles relations concernant les premières années de sa patrie. Parmi les marques de bienveillance que je reçus de lui, je mets au premier rang la libre disposition d’une bibliothèque assez vaste, qu’il avait formée à la longue de ses modestes économies. La partie la plus précieuse en était, sans contredit, un assez grand nombre de manuscrits, presque tous écrits par des missionnaires. Bien peu, à dire vrai, eussent mérité de voir le jour : c’étaient de monotones et interminables récits de conversions de sauvages, de miracles et autres faits semblables, de nature à intéresser seulement le couvent auquel appartenait l’auteur. Enfin, je tombai sur un véritable trésor, un mince cahier d’une centaine de pages environ, écrit en latin, une espèce de chronique de la province de Saint-Paul. L’absence de date me mit d’abord en défaut ; mais je reconnus bientôt que cette chronique ne pouvait être que du premier quart du xviie siècle. Un passage faisait allusion à la première expédition des Hollandais au Brésil, qui eut lieu en 1624 ; il y était en outre souvent question du père Anchieta, mort, comme on sait, en 1596, et que l’auteur paraissait avoir connu. Je ne crois pas me tromper beaucoup en fixant la date de ce curieux manuscrit aux environs de l’année 1630.

Par une rare exception, il y était peu question de miracles et beaucoup des mœurs privées des Paulistas, ainsi que de quelques-unes de leurs expéditions. En maints endroits, le bon père qui avait composé cette histoire, après avoir rapporté quelque énormité, priait le ciel de ne pas se hâter de punir cette race perverse,