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Sighebert, le roi de Neustrie regardait cette ville comme sa propriété, et ne tenait plus aucun compte du serment qui lui en interdisait l’entrée. Soit que réellement il craignît quelque entreprise de la part des partisans secrets de Brunehilde et de Merowig, soit pour faire plus d’impression sur l’esprit des juges de Prætextatus, il fit le voyage de Soissons à Paris, accompagné d’une suite tellement nombreuse, qu’elle pouvait passer pour une armée. Cette troupe établit son bivouac aux portes du logement du roi. C’était, selon toute apparence, l’ancien palais impérial, dont les bâtimens s’élevaient au sud de la cité de Paris sur la rive de la Seine. Sa façade orientale bordait la voie romaine qui, partant du petit pont de la Cité, se dirigeait vers le midi. Devant la principale entrée, une autre voie romaine, tracée vers l’orient, mais tournant ensuite au sud-est, conduisait, à travers des champs de vigne, sur le plateau le plus élevé de la colline méridionale. Là se trouvait une église dédiée sous l’invocation des apôtres saint Pierre et saint Paul, et qui fut choisie pour salle d’audience synodale, probablement à cause de sa proximité de l’habitation royale et du cantonnement des troupes[1].

Cette église, bâtie depuis un demi-siècle, renfermait les tombeaux du roi Chlodowig, de la reine Chlothilde et de sainte Ghenovefe on Geneviève. Chlodowig en avait ordonné la construction, à la prière de Chlothilde, au moment de son départ pour la guerre contre les Wisigoths. Arrivé sur le terrain désigné, il avait lancé sa hache droit devant lui, afin qu’un jour on pût mesurer la force et la portée de son bras par la longueur de l’édifice[2]. C’était une de ces basiliques du Ve et du VIe siècle, plus remarquables par la richesse de leur décoration que par la grandeur de leurs proportions architectoniques, ornées à l’intérieur de colonnes de marbre, de mosaïques et de lambris peints et dorés, et à l’extérieur d’un toit

  1. Voyez l’Histoire de Paris par Dulaure, tome ier, aux articles Palais des Thermes, rue Saint-Jacques, rue Galande, et rue de la Montagne-Sainte-Geneviève.
  2. Tunc rex projecit à se in directum bipennem suam, quod est francisca ; et dixit : Fiatur Ecclesia beatorum apostolorum, dùm auxiliante Deo revertimur. (Gesta regum francor., apud script. rerum francic., tom. ii, pag. 554.