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qui avait offert une paire de gants à M. Thom, prit un vieux mouchoir de préférence à un schelling, puis à un souverain d’or que celui-ci lui présenta successivement.

« En soupant dans la soirée chez le gouverneur, nous apprîmes de lui et de M. Kijer la manière dont ils passaient leur temps dans cette solitude. Leur principale occupation était la chasse des animaux sauvages, ou la pêche des baleines, des phoques et du poisson, suivant que la saison le permettait. Il nous dirent qu’ils exportaient chaque année, en Danemarck, environ trois mille peaux de rennes, mais que la quantité d’huile de baleine qu’ils pouvaient se procurer variait beaucoup : dans certaines années, ils ne prenaient que deux de ces cétacés, et dans d’autres ils allaient jusqu’à douze. Les années les plus tempérées étaient à cet égard les moins favorables.

« Personne ne s’attendra à apprendre qu’il y eût des arbres dans le jardin du gouverneur, puisque les îles Shetland elles-mêmes passent pour n’en posséder qu’un seul ; mais nous y trouvâmes de la salade, des radis et des raves. L’angélique sauvage abonde ici comme en Laponie, ainsi que le cochlearia et l’oseille, plantes éminemment utiles à des hommes qui font une énorme consommation de la nourriture animale la plus grossière. L’hiver est pour eux la saison la plus saine ; et c’est pendant l’été que leurs principales maladies, qui sont en général des affections pulmonaires, ont coutume de régner. Que la médecine puisse leur être d’un grand secours, c’est une question qui regardait notre chirurgien et non pas moi ; mais les malades ne peuvent du moins avoir beaucoup à souffrir des médecins, car le plus voisin qu’ils aient à leur portée réside à deux cents milles de là sur la rivière de Baal, et sa clientelle n’est pas assez considérable pour qu’il puisse faire beaucoup de mal.

« 25 juillet. — En montant sur le pont ce matin à six heures, tandis que l’équipage dormait encore, j’aperçus un pauvre Esquimaux attendant dans son canot, le long du bord, et tenant une rame qu’un de nos bateaux avait perdue, et qu’il avait trouvée par hasard. Il va sans dire que sa probité fut généreusement récompensée, bien qu’il ne parût pas s’attendre au présent qui lui fit le plus vif plaisir. J’ignore jusqu’à quel point il faut attribuer aux efforts du digne ecclésiastique d’Holsteinborg l’action honnête de ce naturel, ainsi que la conduite régulière de tous ceux de l’établissement en général ; mais, quelle qu’en soit la cause, je ne fais que rendre justice au bon caractère de cette nation, partout où je fus à même de l’observer, en disant qu’elle est du nombre des meilleures peuplades sauvages qui aient été visitées jusqu’à ce jour par les voyageurs, sur n’importe quel point du globe.