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La garde nationale, étant l’assemblée armée des citoyens, devait élire ses officiers. Le système établi par la loi du 22 mars 1831 combine l’élection directe avec l’élection indirecte. Ainsi, les gardes nationaux de chaque compagnie se réunissent pour nommer directement tous leurs officiers, depuis le capitaine jusqu’aux caporaux ; pour nommer le chef de bataillon, chaque compagnie désigne un certain nombre de sous-officiers et de simples gardes, qui votent communément avec les officiers ; enfin, les chefs de légion et les lieutenans-colonels sont choisis par le roi sur une liste de dix candidats, présentés, à la majorité relative, par la réunion des officiers et des délégués des compagnies. Les grades inférieurs appartiennent, comme on voit, à l’élection directe ; l’élection indirecte concourt avec la nomination royale pour les grades supérieurs.

La loi n’a fait, du reste, que régulariser et confirmer l’organisation improvisée en 1830 par l’élan spontané des citoyens. L’effectif des gardes nationales qui avaient pris les armes était de 3,572,924 hommes avant le 22 mars 1831. Le recrutement de 1832, opéré en vertu de la loi, a constaté que 1,947,846 hommes étaient portés sur le contrôle de réserve, et 3,781,206 sur les contrôles du service ordinaire, ensemble 5,729,052 hommes. L’organisation de la garde nationale se trouvait alors suspendue dans plusieurs communes des départemens de l’ouest ; aujourd’hui le nombre des citoyens inscrits sur les contrôles peut être évalué à six millions[1].

Tous les trois ans, cette immense population, près de quatre millions de gardes nationaux en état de service ordinaire, enrégimentés par compagnies, par bataillons et par légions, se réunissent dans les trente-sept mille communes de la France pour procéder à la nomination de leurs officiers. La société tout entière entre en mouvement. Il y a là un moment d’épreuve où, l’autorité n’étant qu’une candidature et où le pouvoir s’humiliant devant l’élection, on pourrait craindre pour le maintien de la discipline. L’épreuve s’est déjà renouvelée deux fois, et hâtons-nous de dire qu’elle a tourné complètement à l’avantage de l’institution.

C’est assurément une des applications les plus remarquables du

  1. L’organisation de la garde nationale avait été d’abord suspendue dans 2,490 communes appartenant à 17 départemens, sur lesquelles 390 étaient autorisées au 25 novembre 1832.