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LA NAVARRE ET LES PROVINCES BASQUES.

ques ne combattent que pour leur indépendance, et non pour la cause carliste, la question se simplifie. Pour en trouver la solution, cherchons encore dans l’histoire.

Lorsque, après la mort de Louis XVI, les Bourbons d’Espagne osèrent déclarer la guerre à la France, et tentèrent, de leur côté, l’invasion de notre territoire, la république, déjà victorieuse de la Prusse et de l’Autriche, eut bientôt châtié les fanfaronnades d’Aranjuez. Non-seulement on rejeta les Espagnols au-delà des Pyrénées, mais deux armées françaises, pénétrant à leur poursuite dans la Péninsule, montrèrent le chemin que suivit plus tard Napoléon pour une cause tout opposée. Tandis qu’en Catalogne, Dugommier prenait Figuières et Rosas, le général Moncey pénétrait jusqu’au-delà de l’Èbre par les provinces basques. Ces provinces tinrent alors une conduite bien différente de celle qu’elles adoptèrent depuis contre l’invasion de 1808. En 1794, au lieu de prendre parti pour l’Espagne, et de s’opposer à l’entrée des Français, elles gardèrent une prudente neutralité. Le député-général de Guipuzcoa, Aldamar, stipulant comme pouvoir exécutif d’un pays indépendant, fit un traité avec le général Moncey, par lequel il autorisa le libre passage des troupes françaises dans la province, sous la condition qu’elle serait traitée comme nation neutre, et que les Français ne pourraient lui imposer ni réquisition, ni charge de guerre. Ce traité fut considéré d’abord par la cour d’Aranjuez comme un acte de trahison, et Charles IV voulut faire brûler en effigie le député-général Aldamar. Celui-ci représenta, pour sa défense, que le Guipuzcoa n’était pas une province d’Espagne, mais une nation libre, et qu’il avait dû adopter pour elle le parti le plus conforme à ses intérêts. Cette justification fut si bien accueillie, que, loin de faire pendre Aldamar après la paix, le roi d’Espagne le nomma l’un de ses commissaires pour les liquidations à régler avec la république. Ce traité, conclu entre les provinces exemptes et le général français, fit naître l’idée de les ériger

    choisi les chefs, et tracé des instructions à Zumalacarregui lui-même, lequel, malgré ses succès et sa renommée, leur était complètement soumis. Cette junte a toujours conservé la même attitude et le même pouvoir. Formée d’hommes du pays choisis par les habitans, elle représente l’intérêt provincial, et lui subordonne tout intérêt étranger ; elle a nommé les successeurs de Zumalacarregui ; elle leur impose des plans de campagne défensive, et, conservant enfin dans toute son étendue la direction suprême de l’insurrection, elle ne laisse au prétendant que les ridicules honneurs d’une royauté nominale.