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aujourd’hui, par une correspondance portugaise, que la prétendue découverte de M. Wagenfeld n’est qu’un très docte roman historique[1], et que le couvent où le manuscrit avait été, disait-on, trouvé, n’existe pas plus que l’abrégé du chroniqueur grec.

M. Cayx a entrepris une Histoire de l’Empire romain depuis la bataille d’Actium jusqu’à la chute de l’empire d’Occident[2]. Le premier volume de cette histoire, qui en promet plusieurs, contient le récit des évènemens écoulés depuis la fin des guerres civiles jusqu’à la mort de Néron. L’auteur, qui divise son sujet en trois périodes, a traité dans ce volume la première. La seconde, qu’il étend depuis l’avénement de Galba jusqu’à Dioclétien, et la troisième, qu’il prend de Dioclétien pour la pousser jusqu’à Augustule, seront l’objet des publications suivantes. Il pense que les deux périodes restantes ne demanderont pas chacune plus d’un volume égal à celui qu’il nous donne aujourd’hui, et qui n’a pas moins de sept cents pages. L’ensemble de son histoire serait donc de trois ou au plus peut-être de quatre volumes ; ce qui, dans une aussi vaste matière, et avec le développement complet qu’y donne l’historien, indique un effort et un mérite de concision. La méthode que suit M. Cayx dans le premier volume, et qui sera celle des suivans, ne le range, à proprement parler, dans aucune des écoles historiques en vogue, et n’en est pas moins bonne pour cela. Il s’élève lui-même, dans sa préface, par quelques mots judicieux, contre l’école dite fataliste et l’école symbolique. Il n’est pas d’ailleurs de l’école pittoresque, en ce qu’il ne s’attache pas à raconter exclusivement et à décrire sans entremêler la réflexion. M. Cayx, esprit de sens et d’expérience, nourri des nombreuses lectures qu’exige une si mûre étude, a voulu reproduire toute la série de ces faits compliqués, en y jetant la clarté de l’exposition sans négliger celle des jugemens qu’il y ajoute. Il est, moins l’éclat, de cette école de Tacite dont il rencontre tout d’abord le secours et les exemples ; il est de l’école judicieuse de Polybe, ne visant pas aux tableaux, mais à un enseignement sérieux et rassis. La lecture n’y perd rien en agrément : cela est presque redevenu une nouveauté que de rencontrer l’histoire ainsi écrite sans effets, sans théories, d’un style sain, avec les faits complets et les réflexions qui ne les quittent pas. Dès le second chapitre, M. Cayx a examiné et discuté dans un détail intéressant les moyens et le fond de cette constitution nouvelle, encore vague, qui se précisait en la personne d’Auguste, et que ses successeurs ont bien vite poussée au pur despotisme. M. Cayx fait très bien compren-

  1. On vient d’annoncer la publication prochaine du texte grec de Philon de Biblos : elle prouvera le savoir philologique de M. Wagenfeld, et non pas l’authenticité de sa découverte. Le seul moyen de lever tous les doutes serait de soumettre le manuscrit original à l’inspection de quelques érudits.
  2. Librairie de Colas, rue Dauphine, 32.