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Au moyen-âge, les écoles latines du Nord étaient établies dans les couvens ou dans les chapitres métropolitains. C’était là que les prêtres, les clercs, les religieux, faisaient leurs études. Ceux qui aspiraient à une science plus élevée se rendaient dans les universités d’Allemagne ou à l’université de Paris. Le couvent de Soro est l’un des plus anciens couvens de Danemark. Il fut fondé au xiie siècle par la famille de l’évêque Absalon, qui, selon l’usage, y établit aussi une école.

En 1586, Frédéric II fonda, sur les élémens très restreints de l’école claustrale, une grande institution qui devait recevoir soixante élèves.

En 1623, Chrétien IV, qui s’affligeait de voir la jeune noblesse de Danemark émigrer sans cesse sous le prétexte d’aller étudier en France ou en Allemagne, ajouta à l’école fondée par Frédéric II une classe d’enseignement supérieur à laquelle il donna le nom d’Académie. Il dota cette nouvelle institution de plusieurs grandes propriétés ; il y appela des maîtres distingués, et il ordonna à ses officiers, à ses gentilshommes, d’y envoyer leurs fils. Bientôt l’école de Soro eut sa bibliothèque et son imprimerie. Elle réunit quarante élèves nobles. Elle se signala par sa méthode d’enseignement et ses travaux. On enseignait alors, à cette école, le grec, l’hébreu, le latin, le français, le droit, l’histoire, la politique, les mathématiques. Il y avait en outre des maîtres d’armes, de musique, de dessin, d’équitation et de jeu de paume.

Sous le règne de Frédéric II, les guerres du Danemark avec la Suède portèrent un coup mortel à l’institution de Chrétien IV. Les Suédois pénétrèrent en Zélande, ravagèrent les biens de l’Académie. Les élèves s’en allèrent, et l’école fut fermée.

Vers le milieu du xviiie siècle, Chrétien VI essaya de lui rendre une nouvelle vie. Frédéric V agit dans le même but, et plusieurs hommes distingués l’enrichirent de leurs dons. Le colonel Kalckrenz lui légua une partie de ses propriétés, et le poète Holberg lui donna toute sa baronie. Elle déclina cependant encore une fois ; elle perdit peu à peu ses élèves ; et au commencement de ce siècle, on ne comptait plus à Soro que des professeurs pensionnés. Les étudians étaient loin. Elle n’était pas dissoute, mais elle n’agissait plus.

En 1813, un incendie consuma l’ancien bâtiment de l’école et la bibliothèque. Cet évènement, qui semblait devoir être pour l’institut de Soro le coup de grâce, devint, au contraire, pour lui un signal de régénération. Le roi prit en pitié la pauvre école de Chrétien IV, si long-temps oubliée. Il donna des ordres pour que l’Académie fût remise en vigueur, et comme elle avait fait, dans ses années de repos, de larges économies, elle bâtit, à la place de l’antique maison qu’elle occupait autrefois, un magnifique édifice. Rien ne manque à cette nouvelle construction, ni les vastes galeries pour les collections, ni les salles de cérémonie, ni les comfortables auditoires des professeurs. Tout a été disposé avec luxe et dans de grandes dimensions. Ce n’est pas un bâtiment d’école, c’est un palais de roi.