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ORGANISATION FINANCIÈRE DE LA GRANDE-BRETAGNE.

n’étaient plus que de 495 millions, et de 163 millions en 1831 ; aujourd’hui ils s’élèvent à peine à 60 ou 70 millions. Il faut voir cependant avec quelle anxiété, lorsqu’il survient quelque changement dans l’état du commerce, on attend la déclaration de la Banque, qui abaisse ou élève le taux de l’escompte, pour en apprécier les conséquences. Chacun de ses actes est un exemple que la foule des spéculateurs suit religieusement.

À la fin de 1836, la Banque n’eut qu’à refuser le papier de quelques maisons américaines établies à Londres, pour déterminer la crise qui se préparait à faire explosion ; c’est encore une décision de la Banque qui a marqué le premier temps d’arrêt dans cette série de désastres commerciaux. En venant au secours des maisons puissantes qui étaient en péril, et en offrant de prêter 50 millions de francs à la Banque des États-Unis, elle a relevé le courage des commerçans. Or, dans les catastrophes de ce genre, on a tout réparé, quand on a détruit la peur.

Les billets de la Banque de France n’ont pas cours en France, hors de Paris. Les billets de la Banque d’Angleterre, qui ont la valeur de l’or dans la Grande-Bretagne, sont reçus au pair dans toutes les places de commerce du continent. Est-ce le monopole qui confère une telle puissance ? et qu’ont de commun les priviléges de la Banque avec cette domination qu’elle exerce sur le crédit dans des contrées que séparent leurs usages, leurs lois, et peut-être leurs intérêts ? Un écrivain, du reste fort compétent, M. M. Chevalier, a exprimé l’opinion que la Banque d’Angleterre ne s’occupait point des opérations du change extérieur. Cette observation n’est pas complètement exacte. Sans doute la Banque n’intervient pas directement ; mais elle domine le cours du change, et le règle dans les grandes occasions. En donnant à ses billets la valeur de l’or, elle a, par ce seul fait, acquis le bénéfice du change à l’Angleterre ; elle le conserve en accumulant dans ses caves l’or qui n’est pas nécessaire à la circulation. Dans les momens de crise où l’exportation des métaux précieux devient plus abondante et fait tourner le change au désavantage du commerce anglais, c’est encore la Banque qui rétablit l’équilibre, soit en élevant le taux de l’escompte, soit en vendant des bons de l’Échiquier pour réduire d’autant la circulation de ses propres billets, soit en vendant de l’argent pour avoir de l’or. Elle n’agit pas à la manière d’un spéculateur, mais comme un gouvernement, rectifiant ou réparant dans les résultats généraux les écarts des efforts individuels.

Tout irait bien si, dans l’accomplissement de ce rôle providentiel,