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LA TAMISE.

Ô toi qui marches en silence
Le long de ce rivage noir,
Et qui regardes l’onde immense,
Avec les yeux du désespoir,
Où vas-tu ? — Je vais sans folie
Me débarrasser de la vie,
Comme on fait d’un mauvais manteau,
D’un habit que l’onde traverse,
D’un vêtement que le froid perce,
Et qui ne tient plus sur la peau.

— À la mort ! Enfant d’Angleterre !
À la mort comme un indévot,
À la mort quand sur cette terre
La vie abonde à large flot ;
Quand le pavé comme une enclume
Jour et nuit étincelle, fume,
Et quand armé d’un fort poitrail,
Le chef encor droit sur le buste.
Tu peux fournir un bras robuste
Et des reins puissans au travail !

— Travaille ! est bien facile à dire,
Travaille ! est le cri des heureux,
Pour moi la vie est un martyre,
Un supplice trop douloureux.
Dans mon humble coin sans relâche.
Comme un autre j’ai fait ma tâche,