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Il est nécessairement tombé dans l’imitation ; et malheureusement il n’a pas toujours imité avec talent. On excuserait volontiers l’imitation en elle-même ; il est bon peut-être de préférer, en commençant, l’étude d’un modèle à une recherche ambitieuse de la nouveauté. Mais si l’imitation est maladroite, la critique peut justement se plaindre et reprocher à l’écrivain non un défaut d’originalité, mais un manque de goût.

La création de Volberg, le héros du poème, n’a rien coûté à M. Pécontal. En traçant ce caractère, il s’est souvenu du René de M. de Châteaubriand, du Faust de Gœthe et du Manfred de Byron. Nous ne voulons pas nous arrêter sur les nombreuses imperfections de la copie. Une fois décidé à personnifier le doute, M. Pécontal ne pouvait guère mettre en oubli les types dont nous parlons, et presque involontairement il devait chercher à les reproduire. L’ironie, le désespoir et l’orgueil s’expriment donc tour à tour par la bouche de Volberg ; mais c’est, nous l’avons dit, une imitation sans chaleur et sans portée. Il y a aussi quelques vers sur la pâleur de Volberg, sur les rides de son front et sur la tristesse de son sourire, qui rappellent tout ce que des copistes maladroits ont pu dire sur le même sujet. M. Pécontal n’a eu que la peine de traduire ou de consulter sa mémoire. Nous eussions mieux aimé qu’il se confiât en ses forces.

Le second personnage du drame est une personnification de la foi. Pour celui-là, M. Pecontal ne s’est souvenu que de Jocelyn. Ce personnage est un curé de campagne qui emploie volontiers la parabole pour rendre plus clairement sa pensée et qui prodigue les dissertations pieuses sur la poésie du christianisme. Mais dans le beau livre de M. de Lamartine, c’est l’amour qui égare le prêtre ; dans Volberg, c’est le voltairianisme qui joue le rôle de l’amour. La passion, en se purifiant, ramène Jocelyn au sentiment religieux ; l’ami de Volberg ne comprend le christianisme que lorsque sa raison est convaincue comme son cœur. C’est la lecture de l’évangile, ou plutôt c’est le raisonnement appliqué à cette lecture qui le ramène à la foi. À part cette différence, le prêtre dans Volberg est une réminiscence évidente du pasteur de Valneige.

Nous ne parlerons pas du troisième personnage qui figure sans doute dans le poème, l’amour méconnu et sacrifié. Noëmi n’a d’autre emploi que de servir au dénouement. Nous serions embarrassé de lui assigner un meilleur rôle et d’expliquer autrement sa brusque apparition, au milieu des pieux entretiens de Volberg et du prêtre. Pourtant M. Pécontal paraît attacher à cette création une certaine importance. En traçant le portrait de Noëmi, il s’écrie avec un naïf enthousiasme : « C’est Ophélia, c’est Anna ; c’est Elvire ; » on aurait tort cette fois de s’en rapporter au jugement du poète. Ni Shakespeare, ni Mozart n’ont rien à revendiquer dans la création de Noëmi.

Il y avait assurément dans la personnification du doute, de la foi et de l’amour, tous les élémens d’une tragédie solennelle ; l’action pour être vraisemblable et attachante n’avait qu’à se déduire de la philosophie. L’auteur de Volberg a-t-il su disposer avec art les matériaux précieux qu’il avait choisis ? a-t-il satisfait à toutes les exigences d’une donnée aussi vaste ? Nous ne le croyons pas, et pour justifier notre assertion il nous suffira sans doute d’exposer rapidement l’action de Volberg.

Au début du poème, le sceptique, découragé, veut chercher dans la