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LA LITTÉRATURE EN DANEMARK.

de leurs longs retards. Elles doivent nous amener à la vraie science et à la vraie poésie.

Au ixe, au xe et même au xie siècle, le Danemark était encore païen. Charlemagne, après avoir converti, par la puissance du glaive plus que par la persuasion, les fières tribus saxonnes, avait pensé, dit-on, à porter ses conquêtes évangéliques au-delà de l’Elbe. La mort l’empêcha de suivre ce projet ; mais Louis-le-Débonnaire l’exécuta. Au congrès qui eut lieu à Thionville, en 821, il fut résolu que le christianisme serait prêché dans le Nord. Ebbo, archevêque de Reims, s’offrit à remplir cette mission et alla demander à Rome les instructions du pape. La bulle qui lui fut donnée par Paschal Ier, est le plus ancien document qui existe sur cette question[1]. Une circonstance inattendue servit le zèle des nouveaux missionnaires. Un de ces petits rois qui se partageaient les états de Danemark, Harald Klak, prince de Jutlande, vaincu dans une bataille, chassé par ses ennemis, était allé chercher un refuge auprès du successeur de Charlemagne. Le pieux empereur saisit avec empressement cette occasion de faire un nouveau prosélyte. Il prêcha le roi païen, le convertit, le baptisa et le renvoya dans son royaume. Quand Ebbo arriva dans le Nord, il trouva un appui auprès du disciple de Louis. Malheureusement, le pauvre prince de Jutlande n’était pas assez fort pour soutenir, comme il l’aurait voulu, la croyance qu’il avait adoptée, et après avoir fait quelques prédications et baptisé quelques personnes, Ebbo retourna en France.

Il fut remplacé dans ses travaux apostoliques par Ansgard, moine de Corbeil. C’était un homme de vingt-cinq ans, fort et hardi, doué de toutes les vertus d’un vrai chrétien et de tout le zèle d’un missionnaire. Il partit avec un de ses amis, nommé Authbert, qui avait la même ardeur de prosélytisme, et après un long et difficile voyage à travers l’Allemagne, tous deux débarquèrent en Jutlande. Là Ansgard poursuivit avec énergie l’œuvre de ses prédécesseurs. Là il fut aussi soutenu par Harald. Il fit renverser des temples païens et détruire des idoles. Mais deux jeunes princes, irrités de voir ces attentats contre leur religion, attaquèrent Harald et le chassèrent encore une fois de son royaume. Ansgard, n’ayant plus d’appui en Danemark, partit pour la Suède, où un vieux roi, descendant de Regnor Lodbrok, avait manifesté quelques intentions favorables au christianisme. Le long du chemin, il fut attaqué par des voleurs qui lui prirent les présens qu’il portait au roi, et environ quarante volumes, ce qui était alors un trésor d’une rare valeur. Ansgard resta en Suède un an et demi, et eut la joie de voir s’élever sur la terre païenne une église consacrée au vrai Dieu.

On a de lui une vie de saint Villehad, qui ressemble à toutes les légendes de saints écrites à cette époque. Il avait écrit un autre livre qui serait maintenant d’une grande importance pour l’histoire du Nord. C’était le journal de

  1. Elle a été imprimée dans les Annales ecclésiastiques de Pontoppidan.