Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 13.djvu/732

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
728
REVUE DES DEUX MONDES.

rente, composa, vers la 120e olympiade, des hilarotragédies, parmi lesquelles on cite un Amphitryon, qui peut-être fut un des modèles de la comédo-tragédie de Plaute[1]. Plusieurs savans modernes, Casaubon[2], Saumaise[3], Ziegler[4], ont pensé que les hilarodes dont parle Athénée[5], tiraient leur nom des hilarotragédies ; mais Hermann[6] soutient, au contraire, que les hilarodes, qui portaient des habits blancs, une couronne d’or, des sandales, et dont les chants étaient accompagnés d’un instrument à cordes, descendaient en ligne directe des rhapsodes, et n’avaient aucun rapport avec les hilarotragédies de Rhinthon et de ses imitateurs.

Si, au contraire, nous classons les acteurs mimes d’après les noms qu’ils reçurent de leur costume, nous trouverons les ithyphalles, les phallophores, les magodes, etc., dénominations qui n’étaient qu’une nouvelle manière de désigner en certains pays des mimes connus ailleurs sous d’autres noms. Ainsi les magodes, les ithyphalles et les phallophores rentraient incontestablement dans la classe des cinédologues. Les Sicyoniens, chez qui les chœurs phalliques et les épisodes sont aussi anciens et peut-être plus anciens qu’à Athènes, conservèrent aux chanteurs phalliques leur ancien nom de phallophores, pleinement justifié par leur costume, comme le prouvent tous les monumens. Le phallophore sicyonien, véritable type du mime primitif, ne portait pas de masque ; il avait seulement le visage barbouillé de suie, ou couvert d’écorces de papyrus[7]. Ce comédien de Sicyone, que nous verrons se transformer en Planipes à Rome et en Arlequin à Bergame, se ceignait d’un plastron fait d’un tissu de serpolet, surmonté de feuilles d’acanthe : de plus, il se coiffait d’une couronne de lierre et de violettes, et se revêtait d’une caunace. Les phallaphores s’avançaient en mesure, les uns par les portes latérales (πάροδοι), les autres par la porte du milieu ; leur début était invariablement :

« Bacchus ! Bacchus ! Bacchus ! c’est à toi, Bacchus, que nous consacrons ces airs. Nous ornerons leur simple rhythme par des chants variés, qui ne sont pas faits pour des vierges[8]. Nous n’employons pas de vieilles chansons ; l’hymne que nous t’adressons n’a jamais été chanté. »

Après ce prologue, le phallophore s’avançait d’un pas rapide. Il avait le privilége de persifler qui bon lui semblait, mais en s’arrêtant à une place. On voit que ce mime sicyonien, comme son successeur romain et bergamesque, entremêlait son jeu de sarcasmes improvisés et de plaisanteries préparées à l’avance.

Ithyphalle (penis arrectus) était le nom que reçurent des mimes à peu près de la même espèce que ceux dont nous venons de parler, et plus particulièrement en vogue dans la Grande Grèce. Les ithyphalles différaient des

  1. Athen., lib. iii, pag. 111, C. — Épicharme et Euripide ont traité aussi le sujet d’Amphitryon ; il y eut de plus Les deux Amphitryons d’Archippus.
  2. Casaub., in Athen., pag. 167.
  3. Salmas., Plinian. exercit., pag. 79, ed. Traiect.
  4. Ziegler, De mimis Roman., pag. 39.
  5. Athen., lib. xiv, pag. 620, D.
  6. Herm., De dramat. Græc. comico-sat. (opuscula, tom. I, pag. 43, seqq.)
  7. Athen., ibid., pag. 625, C, D. — Suid., voc. Σῆμος.
  8. Cela semble prouver que chez les Sicyoniens les jeunes filles n’étaient pas admises au spectacle des mimes.