Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 21.djvu/687

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
683
SANTA-ROSA.

hommes et armée de quinze canons. On y envoya cent hommes de renfort. Santa-Rosa alla avec eux.

« Le 8, à neuf heures du matin, il écrivait à Collegno : Uno sbarco non mi pare impraticabile sul punto alla difesa del quale io mi trovo. À onze heures l’île fut attaquée, à midi les Turcs en étaient les paisibles possesseurs.

« De onze à douze cents hommes qui se trouvaient dans l’île, quelques-uns s’étaient sauvés en gagnant l’escadre qui était à l’ancre dans le port, et qui, coupant ses câbles au moment de l’attaque, se fit jour au travers de la flotte turque. Deux vinrent à la nage depuis l’île jusqu’à la forteresse. Ils disaient que le plus grand nombre avait traversé un gué au nord de l’île et s’était jeté dans le Paleo Castro. Ce monceau de ruines fut pris par les Turcs le 10. On ignorait dans la place le sort des Grecs qui s’y trouvaient.

« Navarin était au moment de manquer d’eau. On en distribuait depuis long-temps deux verres par jour à chaque homme. Les munitions de guerre étaient épuisées. Ibrahim fit proposer une capitulation et demanda qu’on envoyât des parlementaires.

« Collegno sortit de la place avec eux le 16 mai, pour tâcher de découvrir le sort de son ami, qu’il ne prévoyait que trop. On lui désigna Soliman-Bey comme ayant commandé l’attaque de l’île. Il le trouva dans la tente du lieutenant d’Ibrahim, sous les murs de Modon. Soliman lui dit avoir examiné tous les prisonniers, qu’il ne s’y était trouvé qu’un seul Européen, un Allemand qui avait été mis immédiatement en liberté, et se trouvait alors à bord d’un bâtiment autrichien. Au reste, Soliman fit appeler son lieutenant-colonel, lui expliqua en arabe le signalement de Santa-Rosa, que Collegno lui dictait en français, et lui ordonna de lui donner le lendemain les informations les plus exactes sur le sort de l’homme qu’on cherchait. Le nom de Santa-Rosa n’était pas ignoré des Turcs. Leur figure prit un air de tristesse lorsqu’ils surent qu’on craignait qu’il ne fût mort. Ils regardaient avec le silence de la compassion son ami qui venait le réclamer.

« Le 18, Soliman-Bey fit demander Collegno aux avant-postes, et lui dit qu’un soldat de son régiment avait vu parmi les morts l’homme dont il lui avait donné le signalement.

« Le 24, la garnison de Navarin fut débarquée à Calamata, où elle avait été transportée sur des bâtimens neutres d’après la capitulation. On y sut que la plus grande partie des Grecs qui s’étaient trouvés dans l’île de Sphactérie le 8, s’étaient retirés à Paleo Castro ; qu’ils y avaient capitulé le 10, et en étaient sortis sans armes, mais libres.