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ÉTUDES SUR L’ALLEMAGNE.

avec Bonaparte, ou les traités faits plus tard avec les puissances alliées, eussent pu leur conférer des droits sur leurs sujets qu’ils n’auraient pas légitimement possédés antérieurement. Avec des dissidences aussi tranchées, il n’était pas aisé d’arriver à un résultat : aussi fut-on bientôt obligé de suspendre les délibérations. Le 16 novembre 1814, le roi de Wurtemberg fit déclarer par son plénipotentiaire qu’on ne pouvait prendre un parti définitif tant qu’on ne connaîtrait pas avec précision l’état des possessions de chaque prince, et que l’intérêt de sa monarchie et de sa maison ne lui permettait pas de contracter des obligations sur un point particulier avant qu’on lui eût communiqué le plan général de l’ensemble et les développemens qui manquaient encore. À dater de ce moment, le comité des cinq puissances cessa de s’assembler, et on ne s’occupa plus officiellement de l’organisation de l’Allemagne. Seulement les ministres des princes du second ordre et des villes libres continuèrent leurs délibérations, quoique n’ayant pas qualité pour rien décider, et demandèrent sans succès la réunion de tous les états allemands.

Il est difficile d’imaginer comment tant de divisions auraient pu cesser et tant de divergences se mettre d’accord, si la nouvelle du débarquement de Bonaparte en France, et bientôt après celle de son Installation aux Tuileries, n’étaient venues tomber comme un coup de foudre au milieu des négociations du congrès et mettre un terme aux lenteurs et aux incertitudes. On eût dit que l’Europe était incapable de rien conclure sans l’intervention de son ancien dominateur. Devant le danger commun, les dissentimens s’effacèrent et les alliances se renouèrent. Chacun fit quelques concessions au moyen desquelles on put régler sommairement les questions territoriales, et on se prépara en toute hâte à une lutte où il fallait être victorieux pour que les décisions qu’on venait de prendre, eussent quelque valeur. La question de la constitution de l’Allemagne fut résolue sous l’empire des mêmes nécessités. La Prusse, et l’Autriche se concertèrent pour présenter un projet qui pût servir immédiatement de base aux délibérations ; des conférences commencèrent le 23 mai, et le 8 juin l’acte fondamental de la confédération germanique était signé. Quelques-unes des parties contractantes, notamment la Prusse et le Hanovre, déclarèrent qu’elles ne donnaient leur signature que parce qu’il valait mieux avoir une confédération imparfaite, que de n’en pas avoir du tout ; elles exprimèrent l’espoir que la diète germanique constituée par l’acte fédéral en corrigerait les défectuosités