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DÉBATS PARLEMENTAIRES.

le germe de tous les embarras, de toutes les impossibilités qu’a rencontrées la France dans ses prétentions les plus modérées et les plus légitimes. Cette puissance a été le centre d’une négociation qui n’eût pas pu se nouer sans elle. Si la note du 27 juillet n’a pas été une inspiration exclusivement française, c’est la France seule qui l’a rendue possible ; c’est elle qui en portera toute la responsabilité devant l’histoire.

Que la Turquie eût fléchi sous le coup du grand désastre de Nézib, et de cette mort du sultan Mahmoud emportant avec lui la force et l’orgueil de l’empire, c’est ce qui n’est pas douteux, si l’on considère les dispositions du divan et du harem à cette époque, c’est ce qui l’est davantage, j’en conviens, lorsqu’on tient compte des influences diplomatiques. Mais quelque action que pût exercer lord Ponsonby, même après le résultat malheureux de ses instigations passionnées, il est certain que la France, exploitant habilement et les dangers de la situation, et les alarmes de l’Autriche, et les dispositions bien connues de quelques ministres turcs, conservait plus de chances de provoquer alors un arrangement direct entre l’empire humilié et son vainqueur, arrêté au pied du Taurus par l’autorité de nos conseils, qu’elle n’en a pu trouver un seul moment dans la négociation déplorable où, pendant le cours d’une année, s’est si tristement usée son influence. Si l’on peut douter de l’efficacité d’une autre politique, il n’est pas permis de méconnaître l’extrémité où nous a conduits celle du concert européen, concert mensonger qui n’existait pas lorsqu’on l’annonçait si solennellement en face du monde, source de déceptions réciproques et successives, pour l’Autriche en 1839, lorsqu’elle rêvait son congrès à Vienne ; pour l’Angleterre, lorsqu’elle osa, au mois d’août de cette même année, nous proposer la complicité d’un autre Navarin ; pour la France enfin, lorsqu’en juillet 1840 elle s’est trouvée soudainement exclue des conseils de l’Europe.

Nous avons entendu, dans cette longue discussion, se jeter tour à tour des récriminations et des reproches. Pour nous, nous dirons, dans la sincérité d’une appréciation consciencieuse, que ce qui nous est apparu jusqu’à l’évidence, c’est l’impossibilité où se sont trouvés les divers cabinets successivement chargés en France de cette grande affaire, d’établir sur un bon terrain une négociation faussée dès l’origine. La pensée de ce concert impossible, nous l’imputerons à qui elle appartient, à la chambre elle-même, qui l’a sanctionnée de son approbation et de son vote ; c’est à elle et à elle seule que nous aurons le courage et la justice de renvoyer la responsabilité du traité de