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mies d’Italie et de France, a dit qu’elles étaient des bals, que les bons esprits y allaient comme les belles femmes au bal, pour y passer leur temps agréablement et pour s’y montrer. Je ne sais si Richelieu, qui aimait tant les ballets, et qui savait qu’on les aime en France, a pensé à cela en fondant l’Académie française ; mais il se trouve que c’est assez vrai. Oui, on y peut voir parfois des bals de beaux esprits, bals parés, brillans, très courus. Plus jeune on aimait mieux un autre bal, plus frivole certainement, plus sérieux aussi, demandez à Roméo. Les beaux esprits, les délicats, en avançant, se mettent à convoiter ce dernier bal commode, riant, honoré. On a tout vu, on a assez dit. On est un peu las de la vie, du festin, non pas assez pour quitter la table ; c’est le dessert. « Je ne sors point, si ce n’est pour aller un peu à l’Académie, afin que cela m’amuse, » disait La Fontaine. En autre saison, ne lui en voulez pas, il eût mieux aimé aller au bois sous la coudrette, même seul, pour dormir parmi le thym et la rosée.

L’Académie française, entre toutes les autres, est la seule qui ait gardé le privilège de donner des bals, ou pour parler moins légèrement, de vraies fêtes. C’en est une toutes les fois qu’elle a à recevoir un nom connu, célèbre. C’en était une l’autre jour et très brillante. Bien des points de vue s’y joignaient. Il y avait jouissance de société, il y avait caractère public et sérieux hommage : un prélat mort, un homme d’état considérable qui le remplaçait, et qu’on nous permette d’ajouter, un homme aimable.

Je ne dirai pas, je ne sous-entendrai pas un mot de politique dans tout ceci, je me hâte de le déclarer, même s’il m’arrivait, par mégarde, de me risquer à toucher au discours de M. Dupin. Pas un mot de politique, ceci seulement : quand on est bien persuadé (et c’est peut-être fort triste) que l’art de gouverner les hommes n’a pas dû changer malgré nos grands progrès, et que, moyennant ou nonobstant les divers appareils plus ou moins représentatifs et soi-disant vrais, au fond cet art, ce grand art, et le premier de tous, de mener la société à bien, de la conserver d’abord, de l’améliorer et de l’agrandir s’il se peut, ne se pratique jamais directement avec succès qu’en vertu de certains résultats secrets d’expérience très rigoureux, très sévères dans leur équité, très peu optimistes enfin, on en vient à être, non indifférent, mais assez indulgent pour les oppositions de systèmes plus apparentes que réelles, et à accorder beaucoup, au moins quand on n’est que simple amateur, à la façon : je rentre, on le voit, en pleine littérature.

Parmi les hommes d’état qui ont paru en première ligne dans nos