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le règne des juntes. Ainsi la junte de Caceres a suspendu et arrêté son évêque ; celles de Grenade, la Corogne, Malaga, Ciudad-Real et autres ont déposé les doyens, dignitaires et chanoines de leurs églises, les curés et autres ministres de la religion, pour en nommer d’autres à leur place.

« Si ces faits, disait le vice-régent, étaient de ceux qui peuvent être soufferts en secret, on se serait tu ; mais il sera manifeste pour V. E. que le territoire de l’église a été envahi, et que l’ordre établi par Dieu même pour la gouverner a été bouleversé, puisque la nomination de ses ministres, leur destitution et leur suspension, après une procédure canonique, est un droit qui lui appartient exclusivement. Subordonner le pouvoir des pasteurs, des juges et autres ministres dans l’exercice de leurs fonctions ecclésiastiques à la puissance temporelle, c’est ne pas reconnaître l’église elle-même. V. E. n’ignore pas qu’on s’est engagé là dans un chemin impraticable. Les hommes vraiment catholiques sont persuadés que la régence du royaume sauvera les fidèles du schisme dans lequel on tomberait infailliblement, si l’on persistait dans une voie pareille. »

Cette réclamation n’est pas la seule que don José Ramirez Arellano ait eu à présenter. Un décret de la régence ayant arbitrairement divisé Madrid en vingt-quatre paroisses, le vice-régent a écrit encore pour se plaindre de cette nouvelle violation des droits de l’église. Mais ce n’est pas encore là la plus importante des affaires qui ont amené la rupture entre la régence du royaume et la nonciature apostolique. La cause décisive de cette rupture est l’affaire de l’évêque de Malaga.

Don Valentin Ortigosa, évêque élu de Malaga, avait soulevé contre lui, par sa conduite, la réprobation de son chapitre, qui l’avait dénoncé à l’autorité canonique, comme auteur de propositions sentant l’hérésie, redolentes et sapientes heresim. Cet évêque avait été appelé à Séville devant le métropolitain, et le diocèse était administré en son absence par un vicaire capitulaire. Après le mouvement de septembre, la junte de Malaga a dissous le chapitre et rappelé l’évêque. Un décret de la régence en date du 1er novembre, se conformant à la volonté toute-puissante de la junte, a ordonné que don Valentin Ortigosa serait rétabli dans l’administration de son diocèse, sans attendre que son procès fût vidé. Don José Ramirez a répondu à ce décret par une protestation vigoureuse, déclarant qu’il ne pouvait avoir d’autre effet canonique que de troubler les consciences des fidèles, et de produire des maux spirituels sans nombre, attendu que tous les actes du nouvel évêque seraient nuls de plein droit, et menaçant don Valentin de la