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idées sagement libérales qui ne sont pas aussi étrangères qu’on le croit aux chefs du clergé espagnol, n’a pu tolérer les empiétemens des juntes et du ministère ; il a offert sa démission. Tout ce qui reste en Espagne de clergé constitué résistera. De son côté, la cour de Rome ne laissera pas fouler aux pieds son autorité sans répondre. La persécution aura fait sans doute de Ramirez de Arellano un cardinal, et ses effets ne se borneront pas là ; ceux des journaux de Madrid qui défendent avec tant de talent et de courage les idées d’ordre et de gouvernement, prévoient chez eux un nouveau soulèvement de la Vendée, qui ne s’arrêtera pas, dit l’un d’eux, le Correo Nacional, à l’une de nos provinces.

Nous savons qu’il est en Espagne comme partout des esprits ardens qui commencent à parler de schisme, de constitution civile du clergé et même de protestantisme. La société biblique de Londres, venant à l’appui des vues politiques du gouvernement anglais dans la Péninsule y répand avec profusion le Nouveau Testament traduit en espagnol. Des missionnaires méthodistes s’y sont introduits et y prêchent publiquement dans plusieurs villes. Malgré ces efforts de l’Angleterre pour semer en Espagne des dissensions religieuses, nous ne croyons pas qu’elle y obtienne des résultats durables. Ce n’est pas au moment où l’ardeur de la réforme s’affaiblit et s’éteint dans tous nos pays les plus anciennement protestans qu’elle parviendra à s’implanter en Espagne, où elle n’a pas pu pénétrer au plus beau temps de son expansion et de sa force. Quelle que soit la puissance du duc de la Victoire, nous doutons qu’il y ait en lui l’étoffe d’un Henri VIII. Nous lui rendons même la justice de croire qu’il n’y pense pas. Il aura signé l’ordre d’exil du vice-régent apostolique, comme il a tout fait, sans se rendre bien compte des conséquences. Ces conséquences l’étonneront probablement beaucoup quand elles se produiront comme l’étonnent dès aujourd’hui, dit-on, les divers projets des hommes qu’il s’est donnés pour soutiens.

Quoi qu’il en soit, tout indique que l’Espagne est sur le point de devenir le théâtre de nouveaux évènemens. Les progressistes ne sont pas encore contens de l’état où ils ont mis leur pays, et qui devrait cependant les satisfaire. Ils méditent de faire un pas de plus. Nous n’avons aucun doute sur le résultat final de toutes ces convulsions : il en sera de la révolution espagnole comme de toutes les révolutions qui ramènent à l’ordre par l’anarchie ; mais il est impossible de prévoir quel sera le résultat immédiat de la nouvelle crise qui se prépare. Le caractère de l’homme sur qui tout repose en ce moment,