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non pour que la France en devînt partie, mais pour qu’elle y donnât son adhésion. Une pareille proposition, on le pense bien, ne pouvait convenir ni à M. de Talleyrand ni au cabinet français, qui, avec beaucoup de peine et après quelques tentatives infructueuses, obtinrent que la convention fût refaite, et qu’elle reçût la forme qu’on connaît. C’est ainsi que prit naissance le traité dit de la quadruple alliance, traité qui, bien que spécial et limité, semblait opposer l’union des quatre états constitutionnels de l’Occident à l’union des trois puissances absolutistes du Nord. L’alliance anglaise était alors dans toute sa force et brillait de tout son éclat.

Malheureusement il survint bientôt des questions qui l’altérèrent sensiblement, et qui en marquèrent le déclin. Mais avant d’en venir à ces questions, il est certains détails personnels qu’il est bon de connaître, parce qu’ils exercèrent une influence notable sur les évènemens qui suivirent. Je veux parler de la fameuse querelle de lord Palmerston avec M. de Talleyrand.

Il y a une école historique qui, systématiquement, s’efforce d’attribuer à de petites causes tous les grands effets. Il y en a une autre qui, non moins systématiquement, ne veut reconnaître que les causes générales, et qui subordonne à une loi fatale et nécessaire tous les évènemens de ce monde. De ces deux écoles, aucune n’a absolument raison, et la vérité est au milieu. Ainsi, il est possible que, dans tous les cas, l’alliance anglaise fût destinée à périr ; mais il est certain que la brouille survenue entre M. de Talleyrand et lord Palmerston prépara la ruine de cette alliance et la précipita. Le cabinet de la réforme, on le comprend, jouissait de peu de faveur auprès des trois grandes cours du Nord et de leurs représentans ; mais, dans ce cabinet, l’objet particulier de leur antipathie était lord Palmerston. Soit que dans lord Palmerston, ancien tory, les ambassadeurs du Nord vissent un renégat, plus odieux à ce titre que ses collègues, soit que, comme ministre des affaires étrangères, ils eussent avec lui plus de points de contact et de sujets de querelle, il était de notoriété publique que contre lui principalement se dirigeaient toutes leurs attaques et toutes leurs menées. À les entendre, lord Palmerston était un brouillon, un révolutionnaire qui, dans un pur intérêt de vanité, eût volontiers mis le feu à l’Europe et jeté les peuples dans l’anarchie et la guerre. Il importait de délivrer promptement l’Angleterre et le monde d’un homme si dangereux. La diplomatie du Nord, on le voit, ne s’est pas mise en frais d’imagination dans la guerre qu’elle a faite dernièrement à un autre ministre des