Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 25.djvu/541

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.



ESQUISSE
D’UNE PHILOSOPHIE
PAR M. F. LAMENNAIS.

C’est une périlleuse entreprise aujourd’hui plus que jamais, que de construire un système complet de philosophie. Dans une époque de grande civilisation, comme la nôtre, il y a tant d’idées en circulation, tant de questions à résoudre, qu’on ne peut guère se proposer de répondre à tout, et de tout renfermer dans un système. La curiosité de chaque siècle laisse à la postérité moins d’anciens problèmes résolus que de problèmes nouveaux à discuter. Il faut donc subir la loi de notre faiblesse ; il faut choisir, ou de tracer un plan général et d’en asseoir fortement les bases, ou de s’isoler dans de patientes recherches sur un objet spécial, pour apporter ensuite cette obole à l’œuvre commune.

Au commencement d’une civilisation, quand la curiosité humaine n’est éveillée que d’hier, c’est l’âge d’or des systèmes. C’est ainsi que l’on voit, dans les premiers temps de la philosophie grecque, toute une famille de penseurs qui viennent, chacun à son tour, avec une confiance admirable, proposer sur la nature des choses une explication universelle, toujours différente il est vrai, mais toujours défini-