Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 25.djvu/701

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
693
RÉVOLUTIONNAIRES ANGLAIS.

minster, il dit que tout était fini, et que le trône allait tomber, il se plaignit hautement de Laud, qui, disait-il, perdait le royaume, et qui était un « misérable, un traître et un moine[1]. » Le malencontreux observateur fut condamné au bannissement, que l’on exécuta sans cérémonie, en le conduisant à la grande grille, l’habit retourné, et en le chassant à coups de fouet.

Pym ne restait pas oisif ; en 1640, Hampden et lui se liguèrent intimement avec les chefs de la révolte religieuse d’Écosse, parcoururent ensemble les provinces anglaises, dirigèrent les choix électoraux, qu’ils firent tomber sur les partisans de la liberté religieuse et civile, et recueillirent des signatures nombreuses pour ces pétitions embarrassantes que la cour voyait pleuvoir de tous côtés. Cette tactique politique, qui n’est pas des plus honnêtes, mais dont l’effet est certain et à laquelle les pays constitutionnels sont accoutumés, eut pour inventeur Pym, infiniment moins scrupuleux que son collègue. Tout était prêt, et les matériaux inflammables se trouvaient accumulés, lorsque, le 3 avril 1640, un nouveau parlement s’assembla, plus nombreux, dès la première séance, que dans les sessions précédentes. Le roi, altier dans ses assertions despotiques, faible et suppliant dans ses demandes, désirait que la chambre s’occupât d’abord de la guerre avec l’Écosse et ensuite des subsides. Si la discussion commençait par s’engager sur la guerre d’Écosse, la cour ranimait ainsi les animosités nationales, réveillait les rivalités, effrayait l’Angleterre sur son péril, et préparait la chambre des communes à céder, à s’associer au roi et à faire pour lui ce qu’il voulait. Le succès dans les débats parlementaires dépend de peu de chose. Pym avait prévu le coup et le redoutait. Il ne voulut pas laisser la première chaleur se dissiper et le premier moment se perdre. Trois ou quatre pétitions, dont Pym était le moteur, succédèrent immédiatement au discours du roi, et, détournant l’attention générale, la forcèrent de se porter, non pas sur l’Écosse ennemie, mais sur les torts de la cour, sur les souffrances populaires, sur l’illégalité des impôts. Ces pétitions produisirent une sensation très vive. Pym vit que le moment était venu, que les royalistes eux-mêmes étaient ébranlés, que son parti frémissait d’ardeur et d’espoir, que cette occasion ne se représenterait pas ; et, prenant la parole, « rompant la glace, comme s’exprime Clarendon, au moment où tous les membres se regardaient sans oser parler, » il déroula, dans un discours de six heures, sans ornemens et tout en-

  1. Strafford’s Papers, 2, 140.